mercredi 25 janvier 2017

Jean Karakos: Celluloïd

L'expérience BYG fut loin de conclure les envies de labels de Jean Karakos...Le plus important d'entre eux étant certainement Celluloïd.


TAPIOCA
Tapioca fut une aventure de courte durée entre 1976 et 1978. Karakos s'associa avec le financier Hugues Balley. Ils éditèrent le premier 45 tours de Téléphone (discogs) et rachetèrent le catalogue de Pôle (Besombes & Rizet, Henri Roger...) un des meilleurs labels expérimentaux électroniques français des années 70 fondé et géré par Paul Putti et sa femme. Il semblerait que Karakos utilisait les tampons (qui servent à presser les disques) de Pôle ce qui affecterait la qualité des pressages Tapioca....Le label compte également des sorties de groupes liés à la galaxie BYG tels que Gong ou Daevid Allen en solo ainsi qu'à l'underground français de la première moitié des 70s (un disque d'inédits de Magma).



Les Tontons M'écoutent
Label temporaire de Karakos n'éditant que 4 disques entre 1978 et 1979. Des rééditions de Magma ou Gong... À noter que le cat number (LTM) apparaît sur certaines références Celluloïd.



CELLULOÏD
Le label naquit officiellement en 1979 même si certaines sorties semblent précéder cette date (des licences de disques de reggae ). Jean Karakos s'associa avec Gilbert Castro, qui fonda également le distributeur Mélodie spécialisé en musique africaine et antillaise et bien sûr Jean-François Bizot. Bizot, décédé il y a dix ans, fut une des figures les plus importantes de l'underground français. Un esprit libre dont la pensée infuse encore de nombreux médias. En 1970, il racheta Actuel (fondé par Claude Delcloo, partenaire de Karakos et Young dans l'épopée BYG après le départ de Boruso) auquel il impulsa une vision plus ouverte et professionnelle (moins proche du fanzine politique des débuts). En 1975 le titre fut sabordé avant de renaître de 1979 à 1994. Il fonda en parallèle le groupe de presse Nova Press et vous l'aurez deviné: Radio Nova à l'heure de la libéralisation des ondes FM en 1981 par ce cher tonton. 


À ces débuts, le label fonctionna selon les bonnes vieilles méthodes déjà éprouvées du temps de BYG: beaucoup de licence. Celluloïd édita ainsi le classique Warm Leatherette de The Normal, des disques de Cabaret Voltaire, Throbbing Gristle, Young Marble Giant, Soft Cell,  etc. Bien que l'on note ainsi un changement de génération de groupes, les formations issues de l'activisme de la fin des années soixante continuèrent de figurer (un peu plus sporadiquement) au catalogue: Henry Cow (groupe Canterbury), Magma, Gong ou encore Etron Fou Leloublan... Le label s'intéressa aussi dès ses débuts à la musique du monde et plus particulièrement au Reggae, une attitude qui coïncide bien avec les centres d'intérêt de Bizet mais aussi ceux de Karakos (comme en témoigne son intérêt pour les musiques cubaines avant la création de BYG).



Deux scènes, à la fois très liées et différentes, firent beaucoup pour la renommée et l'histoire de Celluloïd à partir de 1979. Celluloïd prit en licence de nombreuses sorties de Zé (label fondé par Michael Zilkha et le français Michel Estaban précédemment de la boutique Harry Cover) donnant à la scène new-yorkaise une importante visibilité en France: Suicide, James Chance, Was Not Was, Material... De l'autre, le label de Karakos, Bizet et Castro défendit les groupes français dont les noms figurent aujourd'hui parmi les plus appréciés: Jacno, Mathématiques Modernes, Modern Guy, Nini Raviolette, Artefact... Soit une certaine idée de l'époque, entre disco déviante et jeunes gens modernes. Une union entre la dance music et les circonvolutions punk voir expérimentales...

En 1982, Karakos déménagea à New York, impulsant une nouvelle orientation au label en plus d'un intérêt maintenu pour le rock français (45T des Coronados en 1983, des sorties de la LSD...). Là bas, en compagnie de Bill Laswell de Material (dont le nom croisa aussi celui de Gomelsky: petit milieu !), Celluloïd produisit de nombreux disques de hip-hop parmi lesquels ceux de Beside, Futura 2000 ou Fab Five Freddy. Ce même Bill Laswell participa par ailleurs au fameux Rockit d'Herbie Hancock en compagnie des scratchs Grand Mixer DST également auteurs de quelques maxis sur le label français. Celluloïd fut également très important dans le développement de la world music en France comme en témoigne les nombreuses incursions du label dans le genre: Touré Kounda, Manu Di Bango, Salif Keita.


En 1988, Karakos quitta le navire, l'année suivante, il fit l'un de ses plus fameux coups: La Lambada et oui ! En 1994 il fonda Distance un label de (deep) house au catalogue relevé dans lequel figurèrent: Kings of Tomorrow, Romanthony (chanteur d'un des meilleurs morceaux des Daft Punk entre chose), Kevin Yost, Shazz, DJ Deep, Louis Vega (moitié des MaW), Playin' 4 The City. D'ailleurs concluons ce tour d'horizon sur un de mes morceaux de house favoris, le fantastique Finally des Kings of Tomorrow sorti en 2001 sur Distance (et pris en licence par MoS).

Pour aller plus loin: les entretiens de la BNF de Karakos qui reviennent sur l'ensemble de la carrière.

 

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