jeudi 31 octobre 2013

Jagwar Ma - Howlin (2013)

Jagwar Ma n'est peut être pas un groupe que vous auriez imaginé évoqué dans ces pages. En effet même si nous étions des fans de la première heure de Foals, le patronage du groupe depuis longtemps perdu à nos yeux n'affichait rien qui vaille. Le soupçon de hype et de buzz n'est jamais loin et sur RPUT on se méfie de ces choses là, pourtant quand les disques sont bons il est hors de question pour nous de bouder notre plaisir ou faire nos conards de snob. Du coup vous avez déjà une petite idée de notre opinion sur Howlin le premier album des australiens, ils ont passé l'épreuve de ciblage impitoyable que nous pratiquons (avec un acharnement certain) dans ce lieu.

Howlin' est un des disques les plus jouissifs de l'année, en moins d'une heure les australiens font revivre le Madchester avec une aisance stupéfiante. Ici point de plans repiqués poussifs ou de clins d'oeil trop appuyés, les deux mecs derrière ce nom énigmatique semblent avoir compris l'essence de cette musique: un hédonisme dont la seule limite est le ciel (ou votre fatigue). Ils naviguent avec aisance dans les eaux de Stone Roses ou Happy Mondays, croisent le fer avec les Chemical Brothers (sur le tube en puissance uncertainty) et harmonisent comme les Beach Boys (le très mignon Come save me). Le disque a parfois des allures d'un banquet dionysien  voir d'une auberge espagnole. Comme les camarades de Tame Impala le disque prend des allures de mille-feuilles, parfois cela ne fonctionne tout simplement pas, et à d'autres l'album trouve son rythme de croisière et garde le cape suffisamment longtemps pour nous puissions aussi profiter du voyage. L'orgie de samples, de breaks , de lignes de synthé acide évoquent les grandes heures du big beat de Fatboy Slim, Lo Fidelity All Stars ou Bentley Rhythm Ace et bien entendu les voisins kangourous de The Avalanches. Au milieu de ce bazar de rythmes chaloupés, de sonorités 808, de guitares psychédéliques émergent de véritablement bonnes chansons comme let her go, man i need ou that loneliness

Howlin' a les défauts d'un premier disque, un fourre-tout parfois un peu en roue libre mais qui dans ses bons moments prend l'allure d'une fête sans gueule de bois le lendemain. On préfère retenir cela de ce disque attachant avec des défauts mais aussi des moments de bravoure ! A quand les rockeurs sur la piste de danse ?




lundi 28 octobre 2013

The Karovas Milkshake - Freak Out 7' (2013)

Les Karovas Milkshake sont une formation russe, ils viennent de sortir leur premier 45 sur le label américain Chickpea Records (la mondialisation a aussi parfois du bon non ?). 

Freak out en face A est un excellent morceau pop psychédélique offrant une place de choix à un orgue au son acide digne des meilleurs morceaux de garage rock US. Le gimmick au clavier est très cool , la production ne semble pas totalement justice à la voix mais ce défaut s'oublie bien vite. La compo respecte les codes du genre mais en conserve aussi la fraîcheur. Le titre est cool et a de la gueule. On est happé par les chœurs et cette voix nasillarde et orgueilleuse. Le solo de guitare est psychédélique à souhait, on en redemande ! En retournant le disque on tombe sur un factory de bonne facture, un titre solide plus garage-rock mais peut être pas aussi inspiré et inspirant que freak out .

Les Karovas Milkshake signent un premier 45 enthousiasmant qui espérons le trouvera le chemin vers les oreilles des esthètes du son 60s renouvelé et revigoré par les groupes d'aujourd'hui. Une pièce de choix à ajouter à votre collec' dans les plus bref délais en somme.


vendredi 25 octobre 2013

Prosperi Buri - Gloria (2013)


Je ne sais pas grand chose de Prosperi Buri, si ce n'est que c'est son second 45 tours, qu'il dessine et qu'il est français (breton apparemment), j'ai acheté son disque un peu au pif parce que la pochette m'intriguait et après que mon disquaire préféré (pop culture pour ne pas le citer) m'ait fait écouter un extrait. Il est assez rare de voir des groupes évoluer dans ce genre d'indie pop en France. J'aime tout particulièrement la chanson titre Gloria, avis aux amateurs des Pastels, on y retrouve la même ambiance étudiant nerd et timide chantant à moitié à côté, cette musique de jeunes gens discrets et (un peu trop souvent) bien élevés. Le reste de l'EP lorgne plutôt vers un noise pop lo-fi, slacker jusqu'au bout des ongles, qui a certes un peu du mal à se défaire de ses influences (est-il vraiment nécessaire de les citer ?), mais le groupe le fait et l'assume avec tellement d'honnêteté (voir de naïveté) qu'on s'en fout. En dehors, de cet accent anglais un peu approximatif, cet EP est vraiment bien, le même en français et je vous embrassais sur la bouche (et avec la langue). 



On l'achète sur le label : Inmybed

mercredi 23 octobre 2013

The People's Temple - Brand New Thing (2013)


Le Guide Suprême du People's Temple a pris son ton le plus solennel et grandiloquent pour nous annoncer la nouvelle : It's A Brand New Thing. En effet, les fans des deux premiers albums (que nous sommes) devront être surpris par ce single. Le son est vaporeux, l'instrumentation a pris du recul, et le chant se détache tel une voix divinatoire porté la reverb et des chœurs hantés. Le groupe prend un peu de distance avec leur son garage rugueux et frontal pour l'iriser dans un psychédélisme flottant.

Pour être honnête, la première écoute m'avait pas trop emballée, cette production était si déconcertante ! Pourtant, plus je l'écoute, plus elle me semble essentielle, elle est d'une rare modernité. Prennant la tangente des courants majeurs actuels, elle impose son esthétique avec force et un vrai choix artistique. The People's Temple prend assurément des risques, félicitons les, d'autant que les deux morceaux sont superbes.

Voici la face B.
Retrouvez la face A sur le site des toujours formidables TiM.


The People's Temple - Twice Burned

ACHAT :
Trouble In Mind / Pop Culture (Paris)

lundi 21 octobre 2013

The Ar-Kaics - she does those things to me 7' (2013)

Il y a quelques semaines, un 45 Tours au macaron jaune canari et à la police sombre et sobre faisait son apparition dans le bac d'un de mes disquaires fétiches. Présenté dans une pochette papier blanche anonyme le sept pouces ressemble à ces rééditions bootleg de raretés 60s ou punk. Quelques petits détails trahissent pourtant la modernité de la chose comme le nom du label (Speakertree Records) que l'on connaissait déjà pour le split single des Lilys avec Big Troubles. Les Ar-Kaics sont, selon toutes vraisemblances, un groupe actuel de garage de Richmond, mais on était tenté de croire à l'acétate retrouvé au milieu des poubelles d'un studio miteux du Texas .

She does those things to me en face A est un petit tube garage crasseux et nerveux. La fuzz est hors de contrôle , la rythmique est aussi primaire qu'excitante. La voix morveuse nous nargue de toute sa hauteur, le type veut en découdre et il a pas l'air de rigoler. Le morceau se conclut en apothéose. On reste coi devant une telle orgie de bestialité. En retournant le disque, on tombe sur le presque aussi tubesque i don't want your love sauvage et indomptable. Une face B dont beaucoup de groupes se contenteraient.

Les Ar-Kaics gagnent le titre de la bonne surprise sortie de nulle-part de la fin de l'année. Leur disque est aussi régressif que jouissif. De quoi effrayer la bourgeoise du XVI sur votre santé mentale tandis que vos potes garageux vont essayer de vous piquer le disque quand il sera épuisé !

 

mercredi 16 octobre 2013

Dream Boys - s/t (2013)

Dream Boys est un nouveau groupe de LA signé sur le chouette label Art Fag. Ils ont sorti en septembre 2013 leur premier album que nous chroniquons aujourd'hui. Un LP qui intéressera une bonne partie des fans des Young Sinclairs, Real Estate ou Mantles

La pochette du disque illustre merveilleusement bien la musique du groupe, cette spirale de lumière colorée psychédélique est une métaphore fort bien choisie pour la pop jangly ligne claire des américains. En 10 morceaux ce jeune groupe signe tout simplement un des plus jolis disques d'indie-pop de l'année, un régal pour les oreilles sensibles aux délicatesses de Sarah Records ou Creation Records. Si les Razorcuts et Primal Scream (avant leurs découvertes des drogues psychédéliques) ne sont jamais loin les Dream Boys n'oublient pas de lancer quelques clins d'oeil aux héros locaux comme les Byrds et bien sûr la génération Paisley Underground (avec en tête les géniaux Rain Parade). Ce disque ne pourrait être qu'un poussif hommage à un éden perdu que serait les 80s underground, mais les mecs ont trop de talents pour tomber dans le pastiche. Le songwritting est solide et délicat, ils comprennent sans singer les codes de l'indie-pop. Les voix sont légères et mettent en valeur une orgie de jingle-jangle.  Les Dream Boys magnifient la 12 cordes, portée autour du coup comme un talisman aux propriétés peut être magiques...

Ce premier album des Dream Boys est d'une forme et d'un fond assez classiques mais le plaisir à l'écoute de ces 10 chansons est bien trop important pour passer à coté si vous avez les mêmes sensibilités que moi pour la 12 cordes, la scène de LA, la C86 etc. Les mecs arrivent à sonner frais et redonner de la brillance à cette musique qui se cherche de nouveaux apôtres. On se prend à rêver au coté des garçons pour qu'un peu plus de gens se mettent à jouer de l'indie-pop jangly aussi délicate que charmante. Un de mes albums favoris de la rentrée.

On trouve ce très joli disque sur le site du label ou chez les disquaires (Pop Culture par exemple).



vendredi 11 octobre 2013

Blackmail - Bones (2013)

Blackmail est un nouveau groupe parisien comprenant des ex-Bosco à la production ainsi qu'un membre passé dans Beat Mark au chant. Ils ont édité un premier single en 45 tours (épuisé et non repris sur le LP) avant de sortir cet album en début d'année (en digital) et juillet (vinyle, chez Malditos le label de la boutique de disques Pop Culture, aidé par Abraham de Plastic Spoon).

Dès les premières notes de 1974 prémices d'une guerre nucléaire on est saisi par ses sonorités de synthétiseurs analogiques antédiluviens martiaux. Dans la foulée Turn the heater off pose les bases du son Blackmail, un truc sale et sexy aussi poisseux que vibrant. Les Blackmail ont conçu à travers ce disque une ode aux machines analogiques malmenées par l'ère numérique. Ils ont combiné le meilleur des deux mondes dans un disque aussi radical que cool. Si parfois la voix souffre d'un accent anglais approximatif, la production est toujours là pour prendre le relais et transfigurer des chansons qui tiennent (et c'est là tout le génie du disque) sur le fil. Chaque morceau est porté par une approche à l'os dans lequel tout le superflu a été retiré pour donner un impact énorme à l'ensemble. Le son semble avoir été sculpté à même le magma brûlant, difformes et magnifique. Les lignes de basses sont simples et obsédantes, tirant à chaque fois les morceaux vers des climats paroxystiques. La violence est présente en filigrane mais toujours en retenue, sur le point d'exploser. Chaque morceau est une pierre supplémentaire dans cette cathédrale sonore moite qui doit autant au rock qu'à la musique électronique, le sommet est atteint sur l'incroyable concrete heap concluant le disque sur une énorme gifle.

Si on émet quelques retenus sur le chant, la production est magistrale, moderne sans céder aux modes du temps présent. Le disque est aussi inclassable qu'iconoclaste, empruntant ici et là pour mieux construire un univers qui lui est propre. Blackmail signe avec Bones un premier disque aux allures de manifeste post-nucléaire dans lequel la danse aurait remplacé toute forme de religion. Un album qui doit autant à Suicide ou la Techno de Detroit qu'à JG Ballard et Philip K Dick. 



mercredi 9 octobre 2013

The Young Sinclairs - You know where to find me EP (2013)


Les Young Sinclairs on est super fan sur ce blog, Etienne et moi avons sorti deux de leurs 45 tours ("Hurt my Pride" et "New Day"), et avons également chroniqué plusieurs de leurs autres sorties (leur précédent EP chez PSR ou leur magnifique 45 tours Engineer Man). Ils reviennent avec un 4ème disque pour l'année 2013 (un record pour eux je pense!) sur le label américain Planting Seeds Records.

You know where to find me est un morceau emblématique du son Young Sinclairs, de la 12 cordes, du folk-rock, de belles mélodies, et un midtempo qui rappelle autant les Byrds que les Beatles. Un joli titre dans la lignée des meilleurs morceaux de leurs LP. La face A est complétée par too young, la chanson évoque également ces deux groupes, elle est charmante, pas un tube mais un très joli morceau avec une guitare solo dans le pur esprit merseybeat.

Ear to the ground se démarque du son Young Sinclairs le plus typique et vogue vers des contrées très Rolling Stones, Sam s'y fait plaisir, la guitare fuzz conclue le titre dans un excellent solo. Remember this song est aussi courte que cool, en 1 minute et 35 secondes les Young Sinclairs se réapproprient le meilleur du garage 60s, fuzz agressive, refrain drogué, voix hargneuse des grands jours. On regretterait presque le morceau ne soit pas un peu plus long ! Une preuve supplémentaire des capacités du groupe à sortir du registre purement folk-rock qui fait leur spécialité ! Avec "Hurt my pride" (toujours disponible) ou encore "i make my own laws" les américains tiennent un des meilleurs son garage entendu ces dernières années.

Ce quatrième 45 tours de l'année 2013 est une réussite de plus à l'actif des Young Sinclairs, des 4 titres on retiendra un peu plus la face B qui voit le groupe sortir de son registre classique (où ils excellent par ailleurs) au profit d'une approche un peu plus poisseuse. Un 4 titres d'excellente facture à ajouter au crédit d'un des meilleurs groupes sousestimés du moment.

 Pour acheter le disque direction le bandcamp du label.




lundi 7 octobre 2013

Interview : Venera 4


VENERA 4 ont été un vrai coup de cœur pour moi, à peine j'avais écouter Sun et Seabed Terror, je leur proposais de faire un disque chez nous, la raison, un son incroyable dense et vivant, extrême mais aussi fondamentalement pop tout en gardant un goût pour l'expérimentation (écoutez l'incroyable Haunted Summer). Je suis donc très fier de les avoir dans la bande RPUT. Il me semble que la meilleure manière de vous les présenter est tout simplement de les interviewer.

Présentez nous votre groupe ?
Morgane : Deux filles, deux garçons. Une main de fer dans un gant de velours.
Qu'est ce qui vous a donné envie de faire de la musique ?
Fred : Moi, c’est beaucoup passé par mon frère. Pareil pour mon « éducation musicale ». Pendant au moins 4 ans, il écoutait Sgt Pepper’s tous les matins avant d’aller en cours. Je pense qu’il l’aimait beaucoup. En tout cas moi, même si j’ai rapidement été à fond dans les Beatles, j’ai eu vachement de mal à le réécouter jusqu’il y a quelques années ! Mais ça a beaucoup contribué à ma « culture » musicale. Je me dis même parfois qu’il le faisait peut être exprès.

Morgane : Je n'ai jamais eu envie de faire de la musique, comme je n'ai jamais eu envie de faire des « images ». Sans me poser de question, j'ai manipulé, expérimenté, agencé. Parfois ça prend forme, parfois non. La musique comme la peinture interrogent et ont besoin des regards, taquinent les sens, racontent des histoires. En gros c'est mon moyen d'interagir avec les autres.
Je rejoins Fred, il y a toujours des personnalités et des évènements qui nous poussent à nous engager dans la création, dans le « faire de la musique ». Je repense à mes tantes qui m'emmenaient à Londres, dans les pubs à 4 ou 5 ans ; au diamant de la platine vinyle de mes parents que j'ai cassé en voulant écouter Love on the beat de Gainsbourg à 9 ans,  la découverte de personnages comme David Bowie, Marilyn Manson, qui sont, pour moi, à la fois les artistes et leur propre oeuvre. Tout se fait petit à petit.

Anna : J’ai commencé, sans trop savoir pourquoi,  sans réfléchir, par le synthé puis le piano. Ensuite jouer du classique et du jaaaaaaazz commençait à m’ennuyer, alors j’ai tout arrêté jusqu’à Venera 4. Mais ce qui marque certainement mon envie de « jouer en groupe » c’est quand j’ai commencé à fréquenter les bons lieux, les concerts à Rennes, j’aimais aussi beaucoup l’ambiance qu’il y avait à l’époque, une sacrée effervescence autour des groupes locaux et beaucoup de fêtes ! L’arrivée à Paris et le nombre incalculable de concerts vus n’a fait que confirmer et concrétiser ce que je pensais jusqu’alors hors de ma portée. Yann, qui jouait déjà dans Maria False depuis plusieurs années, a fini par me convaincre de jouer du clavier dans Venera 4.

Et de monter un groupe de shoegaze ?
Morgane : Chacun s'est amené avec son bagage et on a mis en place notre groupe. On n'a rien contre le shoegaze, c'est juste que pour nous on a jamais été dans l'optique de répondre à un genre, d'appartenir à une scène etc. On veut faire notre petit truc et toucher les gens.

Anna : c’était naturel je crois, personne ne s’est dit « tiens on va monter un groupe shoegaze », le terme de shoegaze arrange tout le monde car il englobe certaines caractéristiques communes (saturations, mélodies sucrées), s’il n’existait pas nous aurions beaucoup de mal à définir le son de venera 4, en tout cas en un seul mot…
Sur le style en lui-même, j’imagine que cette envie de shoegazing vient probablement de nos influences communes, My bloody valentine, Jesus and mary chain, Ride pour ne citer qu’eux..Et puis Maria False a été je pense le déclencheur de cette envie, s’en est suivi Venera 4.


Comment avez-vous commencé à jouer ensemble ?
Yann : Avec Anna et Fred, on se connaissait depuis longtemps depuis nos études à Rennes. J’avais fait des démos et je cherchais à monter le groupe sur Paris et puis nous avons tous rencontré Morgane et nous avons directement commencer à retravailler les démos, puis à enregistrer le premier EP, puis à répéter, puis à jouer…un truc classique comme tout les groupes.

Fred : Oui, avec Yann, on se connaît depuis nos premières années rennaises (2004 ou 2005), au départ on jouait dans des groupes différents mais je crois me souvenir qu’on a rapidement voulu faire de la musique ensemble. 

Morgane : J'étais assez loin de la France à ce moment là... J'avais entendu dire que Yann aurait bien aimé avoir un groupe avec une voix féminine, j'ai tenté le coup car j'aimais beaucoup se qu'il faisait. J'ai tout de suite accroché !
Je suis revenue quelques mois plus tard et on a concrétisé tout ça autour de bières et d'idéalisme dans notre bar préféré.

Anna : donc on a commencé grâce aux bières de ce fameux bar…

Jouez vous dans d'autres groupes ?
Yann : Oui, dans future et maria false.

Yann, n'est ce pas trop dur d'avoir trois groupes ? Comment arrives-tu à concilier les trois ?
Yann : Non, il faut juste s’organiser pour pouvoir composer, mixer, enregistrer, répéter. Les trois groupes ont des formations différentes, des processus de composition différents, des sons différents et puis on sort nos EP / LP jamais en même temps…Tant qu’il y a des idées c’est facile, c’est sur après quand tu n’as plus d’idées, ça complique tout.  

Comment composez-vous vos chansons ? seul(e) ? à plusieurs ?
Yann : Généralement Morgane et moi on donne quelques idées de chansons, des bases, après quand ça nous plait à tous, on continue à enrichir les chansons ensemble. Donc pour te répondre c’est seul et à plusieurs.

Fred : Et même si on n’est pas forcément à la base, chacun apporte de toute façon sa ligne, sa touche personnelle. Parfois cela peut faire évoluer complètement le morceau, sa structure etc.

Et les enregistrements, comment ça se passe ?
Morgane : Tout va très vite, on peut dire qu'on est dans une certaine forme de spontanéité, on corrige les choses qui ne vont pas pendant l'enregistrement. On ne part pas avec une idée fixe, tout évolue toujours (très bien). 

Vous semblez apporter un soin particulier au son ?
Yann : Oui, heureusement, je pense que chaque groupe apporte une importance à leur son. Enfin j’espère. On cherche quelque chose qui nous plait, en restant toujours dans nos moyens qui sont assez réduits pour produire les chansons. On bidouille, on bidouille…

Parlez-nous un peu de votre collectif nothing ?
Yann : C’est un collectif qui regroupe différentes formations entre Paris, Rennes, Hossegor, Limoges et Lannion. En ce moment il y a 10 groupes. Il y a dans chacun de ces groupes une vocation à chercher un son, une esthétique oscillant entre l’Acide noise jusqu’à la Dream Pop, le tout dans une démarche DIY totalement libre. On fait ce que l’on veut, comme on veut et surtout quand on veut. En Juin dernier, nous avons réalisé une compilation regroupant 2 chansons de chaque groupe et nous avons comme projet de faire différentes choses pour l’année 2014. En gros c’est tout simple, c’est juste que à plusieurs on sera toujours plus fort que tout seul. Nothing peut être aussi un prescripteur, si tu aimes Maria False par exemple tu pourrais aimer Dead Horse One et puis découvrir Venera 4. Ou l’inverse. 

Fred : A la base, l’idée est surtout de pouvoir regrouper un certain nombre de projets partageant une identité sonore en commun. En aucun cas il ne s’agit d’un label, d’une agence de booking ou de promotion. Pour l’instant, ce n’est une sorte de vitrine. À terme, je trouve qu’il serait super intéressant de créer une émulation en faisant travailler chaque groupe autour d’une contrainte. Une contrainte fixant un objectif commun, un peu comme un Oulipo à base de larsens et de reverb.

Morgane : C'est marrant, je pensais à l'Oulipo ce matin.

Il y a-t-il une sorte de concurrence au sein du collectif ?
Yann : je pense qu’il y a une effervescence. Mais pas de concurrence, ça serait stupide. 

Morgane : Quelle question sournoise !

Vous pensez quoi du shoegaze en France ? J'ai l'impression qu'il y a une petite Emulation en ce moment notamment via Cranes Records ?
Fred : Ca fait en effet quelque temps que je suis les différentes sorties Cranes Records, des Dead Mantra, de Dead Horse One ou des Seventeen At This Time. C’est à chaque fois du bon boulot.  

Morgane : Contrairement à Fred, pour être franche, je ne suis pas toutes les sorties des groupes de shoegaze. J'y suis attentive, mais j'écoute d'autres choses.



Vous aimeriez faire un tour dans l'espace comme la sonde Venera 4 ?
Morgane : À ce qu'il paraît, on ne revient jamais de l'espace, je n'ai pas envie de devenir un cosmonaute un peu halluciné. L'espace me terrifie, même si je trouve magnifique la naissance des planètes, les nébuleuses, je me sens bien plus à l'aise dans mon espace intérieur.  
Venera 4 est une sonde mais Venera signifie aussi Venus en russe. Il y a une symbolique un peu cachée.

Anna : Venera 4 s’est décomposée en y revenant il me semble…Moi dans l’absolu oui j’aimerai visiter cette immensité, mais je suis claustro, je deviendrai folle dans une fusée malheureusement...

Il paraît que vous travaillez sur des versions acoustiques ?
Yann : on travaille sur pas mal de choses, oui.



Parlez nous un peu de votre nouveau single qui vient de sortir chez nous ? et de votre prochain EP ?
Fred : On est super contents du résultat, même si on n’a pas encore eu l’EP entre les mains ! Au-delà du simple fait d’avoir un support physique comme le vinyle, on voulait avoir un bel objet. Ce n’est que mon avis personnel, mais je trouve que Morgane est parvenue à nous sortir deux superbes artworks.

Anna : Quand vous nous avez proposé de sortir un 2nd EP, il nous semblait dommage de ne pas aussi sortir Seabed Terror et Sun en vinyle (malgré leur sortie digitale 1 an plus tôt). On y rêvait et RPUT l’a fait, on est trop content du résultat et maintenant on a hâte de voir ce que ça donne pour l’EP ! On est comme des enfants, merci à RPUT d’ailleurs ;)

Pourquoi avez-vous choisi l'anglais pour chanter ?
Morgane : J'ai toujours aimé le Royaume-Uni pour sa culture, ses artistes, sa langue. J'ai donc toujours écouté de la musique anglophone. Par mimétisme peut-être, je m'y suis mise.
Il ne faut pas se mentir, l'anglais est la langue conventionnelle pour un tas de choses.
Mon père me demande souvent pourquoi je renie mes racines en chantant de cette façon, j'ai envie de lui dire que la langue a peu d'importance, d'abord parce que la majorité des gens se fichent des paroles (aussi bien les artistes que les auditeurs). Que ça soit en anglais, en chinois ou en allemand, écrire des paroles de merde c'est universel. Gainsbourg et ses « Variations sur Marilou », Alex Turner avec « My mistakes were made for you », Morissey et « Hand in glove », c'est peu d'exemples, mais ÇA c'est de l'art. 

Alors plutôt que la langue, ce qui compte pour moi c'est de chanter des mots qui me parlent, des mots qui sonnent, qui s'entremêlent, j'aimerais bien travailler plus le texte à long terme. 
C'est un peu comme si tu demandais à Pollock « pourquoi tu utilises un saut percé plutôt qu'un pinceau ? » La finalité est la même.

Ca serait drôle d'avoir du shoegaze en français, ça ne vous tente pas ?
Yann : Tout nous tente mec.

Précommandez le EP Deaf Hearts du groupe ici :
 http://requiempouruntwister.bandcamp.com/album/deaf-hearts 
Si vous n'êtes pas assez impatient, vous pouvez aussi dores et déjà prendre le 7" : 
http://requiempouruntwister.bandcamp.com/album/seabed-terror

samedi 5 octobre 2013

Pendentif - Mafia Douce (2013)

Pendentif est un nom cité régulièrement sur ce blog, à travers une interview, ou la présence dans nos tops espoirs de 2011 et 2012. Leur premier album Mafia Douce est sorti il y a une petite quinzaine de jour, il était temps que nous y consacrions une chronique !

Le titre et la pochette annoncent la couleur: un disque pop sensuel. Il y a là un certain changement dans l'approche du groupe, ou peut-être de sa perception de notre part. On pensait avoir à faire à un groupe se revendiquant d'une certaine esthétique indie-pop proche de groupes américains comme Real Estate mais Pendentif propose définitivement autre chose, une pop dansante très bien écrite et arrangée. Bien sûr les guitares solaires nimbées de réverb' sont toujours présentes, elles évoquent les lignes métronomiques de Foals (époque Antidote) et plus sûrement encore Beach Fossils. La voix de Cindy aux allures de France Gall (cette touche naïve et charmante) fera dire aux chroniqueurs fainéants que le groupe se situe dans la lignée de La Femme et Granville, pourtant Pendentif propose clairement autre chose. Certes on trouve le goûts pour les synthétiseurs des biarrots et celui des vignettes pastelles des normands, mais le groupe a une science de la chanson pop qui lui est propre.

Mafia Douce se fend de douze chansons, on y reconnait trois morceaux de l'EP (les remarquables "God Save la France" "Pendentif" ainsi qu'une version un poil moins séduisante de "Riviera" ) ainsi que deux titres lancés en éclaireur depuis quelques mois ("Embrasse moi" et "Jerricane" ). Ces derniers sont assez significatifs de de l'évolution du groupe, la super jolie Jerricane évoque l'image que nous nous faisions de Pendentif, tandis qu' Embrasse moi correspond à ce que l'on retrouve effectivement en fil rouge de l'album. Pendentif semble clairement avoir exploré la musique dancefloor, et presque tous les titres auraient leur place dans une playlist pour faire danser vos copines quand elles sont bourrées. La production est soyeuse et luxuriante, presque trop agréable à l'oreille, il manque peut être d'un peu de radicalité, ou d'un soupçon de saleté (qui fait le sel des meilleurs disques de house). Mafia Douce tourne comme une magnifique machine huilée et rutilante mais il manque parfois ce petit grain de sable pour faire partir les choses en vrille, un peu d'imprévu dans cet océan de douceur bleu-violet. La qualité des arrangements est remarquable, le langage pop est maitrisé avec une élégance qui font de Pendentif un sérieux outsider dans le panorama français.  

Pendentif est un groupe attachant et doué. Mafia Douce se place comme une des plus solides réalisations françaises de l'année, pourtant dans un petit coin de notre tête on regrette un peu cet EP à la production maison qui avait fait chaviré nos petits cœurs de poppeux il y a presque deux ans. Avec cet album Pendentif a pris son envol s'éloignant des contrées indie-pop (à l'inverse des anciens collègues de label Aline resté fidèle à cette tradition sonore que nous aimons tant ici) et on espère que le voyage vers des climats plus chauds ici aperçus va durer encore pas mal de temps. On les retrouvera peut-être un jour en héritier d'une certaine idée du disco (Jones Girls, Patrice Rushen etc.) qui sait ?

achat du vinyle



jeudi 3 octobre 2013

Orval Carlos Sibelius - Super Forma (2013)

Orval Carlos Sibelius est un nom qui revient régulièrement depuis quelques années mais comme pas mal de monde je le découvre véritablement avec Super Forma, son dernier album sorti il y a quelques mois chez le très intègre label Clapping Music.

Desintegração m'a mis une claque d'entrée de jeux, pourtant le disque mérite bien mieux que d'être réduit à cette excellente chanson. Super Forma est un voyage dont la destination importe moins que les contrées traversées. Orval Carlos Sibelius jette un énorme pavée dans la mare pop psychédélique avec cet album, une merveille d'arrangements raffinés. Le type a le don pour trouver des instruments (oud, clavecin) ou des traitements sonores épatants (bandes inversées, voix qui se muent en synthés analo, des trompettes en guitare fuzz etc.). Il sonne classique mais suffisamment bancal et tordu pour ne pas s'enfermer dans le pastiche écueil que d'autres n'évitent pas. La longueur et la complexité de certains titres donne parfois à Super Forma des allures d’odyssée prog, un trait qu'il partage avec l'excellent album de Chris Cohen sorti en 2012 chez Captured Tracks. 

Si Super Forma n'est pas sans défaut (une certaine faiblesse de la voix par exemple, trop complexe aussi parfois peut-être), c'est un disque courageux, aventureux et personnel. Chaque titre s'imbrique dans le précédent donnant à l'ensemble ce parfum de mystère à l'image de la pochette. Super Forma une capsule en dehors du temps et non localisable. Chaque titre recèle de détails d'arrangements, de trouvailles mélodiques, ce soucis de perfectionnisme a failli faire capoter le projet mais apporte au final l'écrin que mérite cet album.

Super Forma d'Orval Carlos Sibelius se place dans les plus belles sorties de l'année, un disque qui les qualités de ses défauts: ambitieux quitte à en devenir difficile à appréhender, cependant l'intéressé est trop intelligent pour se laisser aller aux digressions et cadre son disque pour en tirer une certaine quintessence.

achète le disque mon grand !


mardi 1 octobre 2013

Skategang - Freya Police EP (2013)

Après avoir organisé un paquet de concerts super cool à Paris Erika et Émile se lancent dans l'aventure du label sous le nom de Gone with the weed. Parmi leurs premières sorties une cassette 7 titres des franciliens (mais avec un marseillais ex-Dolipranes dedans si j'ai bien suivi) Skategang, un objet fait-maison bien cool (dont on peut modifier la couverture par un système d'ouverture qui permet de changer la tête du perroquet !).

Freya Police propose une powerpop musclée mais super mélodique qui ravira les fans de Bad Sports , Youthbitch ou White Wires (et plus généralement les esthètes du son Douchemaster), j'aurais même tendance à les trouver plus inspirés que les gaziers de Denton! Quinze minutes dans lesquelles les Ramones tapent le bœuf avec les Real Kids et bien d'autres formations historiques ultra-cool. On pense aussi à d'autres formations frenchies comme les Sun Sick, les Protokids et pourquoi pas aussi les excellents Crusaders of Love. Tout ceci m'enchante énormément et suggère l'émergence d'une possible scène powerpop dans le pays du calendos et du rouge. 

Chaque morceau de la cassette est un tube en puissance (critical girl, gumble, freya police, efficient lover etc.) , et j'aurais bien du mal à départager mes préférés malgré une quinzaine d'écoutes au compteur. Bref choppez vous la cassette d'urgence chez Pop Culture ou en passant par la page fb du label !