mardi 31 mai 2016

Rare Bird: Race with the Devil's High concern

Le dernier article sur The Gun m'a donné envie d'écrire sur un autre groupe britannique de la même période bien connu des amateurs de brocantes et autres adeptes des bacs bon marché. En 1970, le slow "Sympathy" (youtube) des londoniens de Rare Bird est un énorme tube en France, il est d'ailleurs possible de l'entendre de temps en temps sur Nostalgie... Il s'inscrit tout à fait dans son époque, écho plus sombre et moins langoureux d'un "Whiter Shade of Pale" de Procol Harum. Comme pour de nombreux autres One Hit Wonders la chanson n'est pas nécessairement représentative du reste du répertoire du groupe. En effet, Rare Bird était d'avantage une formation prog rock, leur premier album fut d'ailleurs la première référence du label Charisma (biographie) très à la pointe du genre (The Nice, Genesis, Hawkwind et d'autres noms parfois moins avouables comme Alan Parsons Project ahah). Le groupe a la particularité de ne pas avoir de guitariste mais deux claviéristes (orgue et piano électrique), Rare Bird est pourtant capable de sonner sacrément heavy comme le prouve "Devil's High Concern" la superbe face B (pas extraite d'un de leurs albums)  de leur tube qui ravira les amateurs de Deep Purple ou Uriah Heep, un disque excellent qu'il est pourtant presque indécent de payer plus d'un euro tant il est commun.  

dimanche 29 mai 2016

The Gun: Race With The Devil

Le Hard Rock naît à partir de la fin des années 60, il est difficile de situer précisément le premier simple ou album à définir le genre tant l'idée est dans l'air du temps dans l'après summer of love de 1967. Deux disques britanniques se détachent cependant: Truth de Jeff Beck en 1968 et le premier album de Led Zeppelin l'année suivante. Ils sont précédés par de nombreux disques, qui s'ils ne remplissent pas tout à fait le cahier des charges s'en rapprochement conséquemment. Je pense notamment au power trio Cream ou aux américains de Blue Cheer ("summertime blues" en 1967) ou Iron Butterfly (et leur classique "In a Gadda-da-Vida" en 1968). 

"Race with the Devil" d'un autre power trio, The Gun (biographie) est un excellent exemple de ces chansons qui se dirigent progressivement vers le Hard Rock tel que nous le définissons aujourd'hui. Bien sûr les arrangements riches de cuivres jurent un peu avec l'énergie brute que l'on est en droit d'attendre dans le registre, cependant le jeu de guitare ultra véloce d'Adrian Gurvitz envoie les Gun dans la sphère proto-hard rock: il est d'ailleurs repris notamment par Judas Priest au début des années 2000. Au fond, peu importe, "Race with the devil" en plus d'avoir été un tube à l'époque reste un super morceau aujourd'hui, témoignage vibrant d'une Angleterre s'éloignant du Swingin' London pour entrer dans les seventies. Cerise sur le gâteau, le pressage français du 45 Tours est assez commun et pas cher (j'ai payé ma dernière copie un euro) et propose une super face b psychédélique avec "Sunshine" que je préfère presque.

vendredi 27 mai 2016

Nicoletta: plusieurs visages

J'ai de plus en plus de difficultés à trouver des 45T dans les bacs non triés pourtant quel plaisir que de découvrir un bon morceau sur un 7 pouces payé cinquante centimes ou un euro ! Dans mes récents bonheurs bon marché le 45 tours de Nicoletta que je vous présente aujourd'hui: édité en 1969, pris pour un modeste euro en 2016.  

Une règle tacite de la variété française des années 60 voudrait qu'il existe au moins un bon morceau pour chaque chanteur français, y compris les plus farouchement à l'opposé de ce qui nous intéresse ici ! Nicoletta est clairement loin d'être la plus éloignée de notre univers. Son style vocal, expressif tourbillonnant et ample est parfois exagéré pour mes chastes oreilles mais elle est une dame de la chanson qui sait mettre des tripes et du cœur dans ses interprétations. Nicoletta est ainsi presque à l'opposé de certaines chanteuses yéyé nunuches et creuses pourtant presque du même âge (bien sûr je ne pense pas à France Gall qui est la grâce incarnée pour moi à cette époque). À la niaiserie de l'adolescence elle oppose une certaine maturité probablement inspirée par sa biographie complexe et dure (wikipedia). J'avais jusqu'ici repéré en 45 tours "Visage" (youtube) enregistré en compagnie des proggeux de Zoo (décidément abonnés aux backing bands des chanteurs de variété notamment Eddy Mitchell), je peux aujourd'hui y ajouter "Qu'est ce que tu fais sans moi" arrangé par l'un des hommes de l'ombre essentiel de la variété frenchy de ces années là: Jean Bouchéty (wikipedia). Si le morceau aura du mal à trouver sa place dans un dj set pour danser, il est très agréable dans le cadre d'une écoute domestique. L'orchestration est superbe (notamment l'usage délicat de la sitar et des percussions), elle sert une très belle composition ambitieuse évoquant en filigrane (selon moi) le travail de Burt Bacharach (et Hal David bien sûr). Bref on s'éloigne certes du freakbeat et du garage cher à ce blog mais parfois il est agréable de reposer les oreilles avec de la musique bien enregistrée et pensée non ?

mercredi 25 mai 2016

Casino Music: pas pour les supermarchés...

Aujourd'hui je vous présente une de mes récentes trouvailles lyonnaises: le premier 45 Tours de Casino Music un duo parisien formé à la fin des années 70 et plus particulièrement la face B de ce simple "Viol AF 015". Comme certains d'entre vous, je l'ai découverte sur la compilation BIPPP éditée par Born Bad il y a dix ans (discogs), elle reste d'ailleurs à ce jour une de mes contributions préférées avec "Ping Pong" d'Act. Le 7 pouces est l'unique sortie du label Vid Ordur, une structure créée par l'animateur de radio Alain Maneval qui a entre autre été directeur des programmes d'Arte et enregistré un curieux (et étonnant) morceaux acid house oriental quelques années plus tard ("souviens toi du futur" youtube). 

Mais revenons-en à  nos Casino Music. L'ossature du groupe est formée par Gilles Riberolles et Eric Weber. Ils répètent à la fin des 70s dans une cave à Saint Mandé (94 sisi) en compagnie de Philippe Chany (futur auteur de "C'est la Ouate") et Didier Esteban...frère de Michel Esteban dont on va reparler dans quelques instants (bio du groupe sur wikipedia). Le groupe édite donc un premier 45T avec "Burger City" et le sus-mentionné "Viol AF 015". Les deux faces sont en phase avec leur époque  mais à différents points cardinaux: ainsi l'excellent morceau occupant la A évoque la disco déviante des Garçons (sans Marie) qui deviennent d'ailleurs leurs collègues de label sur ZE fondé entre autre par... Michel Esteban. En effet, après ce simple Casino Music s'envole pour New York et enregistre un attachant disque de dance music oblique ("Amour Sauvage" ou "Jungle Love") porté par l'incroyable single "faites le proton" dont on devrait reparler un jour. "Viol AF 015" reste relativement unique dans la discographie du groupe, ce post-punk brûlant, sec et anguleux est un petit chef d’œuvre de rock français, les textes ne feront pas l’unanimité en ces temps de bienpensance politiquement correct pourtant leur folie paranoïaque et dystopique a plus à voir avec la science fiction nouvelle vague de Philip K. Dick qu'avec le machisme du rock de stade de l'époque.


lundi 23 mai 2016

Les Bretell's : attachez votre ceinture

Il y a quelques semaines nous évoquions Henri Salvador. Ce dernier en plus de sa propre carrière produisit des groupes et artistes distribués par Philips, puis sous son propre label Rigolo. Parmi eux Tiny Young ou Les Bretell's qui nous intéressent plus particulièrement aujourd'hui. La description au dos de leurs premiers EP sorti en 1963, signée de Salvador, explique le curieux choix de nom: à l'époque des chaussettes j'ai pensé que pour compléter l'habillement de la chanson il fallait des bretelles. Les voici donc en musique. Au delà d'un certain manque d’enthousiasme pour décrire ses poulains, Henri Salvador confirme que le rock n'est pas trop son truc, peut être une question de génération... 

S'il est un des premiers artistes à avoir enregistré du rock & roll en France en compagnie de Boris Vian et Michel Legrand sous le nom d'Henry Cording (youtube), le propos est ironique, les intéressés n'y voyant qu'une mode passagère (wiki) ! Il récidive donc sept ans plus tard en lançant une pique aux groupes twist et notamment les Chaussettes Noires d'Eddy Mitchell (et de Créteil, sisi!). Quoi qu'il en soit nos Bretell's n'évoluent pas tellement dans un registre rock & roll, nous restons dans le spectre d'influences chères à Henri Salvador: jazz, musique brésilienne et latine (notamment bossa nova) etc. et ce, malgré la volonté affichée de pasticher le twist des rockeurs français. Le résultat est néanmoins tout à fait charmant. Chacun des quatre morceaux est d'excellente facture. Deux évoquent des twists ("Lulu d'Honolulu" et "Ne Dis Pas"), "Vous" est un joli slow (youtube) et enfin "Marchand de Melons" est une reprise étrange et amusante du classique d'Herbie Hancock "Watermelon Man" (youtube). Au jazz se substitue un rythme latin, très certainement influencé par Mongo Santamaria (youtube) mais rien ne prépare aux paroles...Elles oscillent entre la connerie abyssale et le génie, elles semblent volontairement stupides et novelty ce qui les rends d'autant plus terribles. Notons les interventions d'Henri Salvador qui ponctuent la chanson de ses rires et enfin d'un très cool solo d'orgue, la dernière touche à cette fascinante reprise d'un classique ultime du jazz. 

samedi 21 mai 2016

The Byrds: jingle jangle

The Byrds est un de mes groupes fétiches avec Big Star, The Beatles et The Zombies, par conséquent il m'est difficile d'écrire sur eux, cette maudite peur de ne pas être à la hauteur ! Ainsi n'ai-je jamais consacré d'articles directement sur ces Oyseaux là et pourtant ils sont si souvent présents ici ! Je les mentionne en effet très régulièrement... En toute franchise, je ne suis pas un inconditionnel de tous leurs albums: j'ai toujours un peu de mal à être à fond sur la période Gram Parsons (Sweetheart Of The Rodeo en 1968) et bien sûr les albums tardifs (à partir de Ballad of Easy Rider en 1969) ne sont tout de même pas aussi bons malgré quelques morceaux fantastiques (par exemple "Gunga Din" écrite par le batteur Gene Parsons, à écouter ici). Deux albums ont spécialement mes faveurs: Younger Than Yesterday (1967) et The Notorious Byrd Brothers (1969), deux 33 tours proches de la perfection et parmi mes favoris de tous les temps, ce qui ne retire rien au mérite des autres que je chéris presque tout autant ! 

Contrairement à d'autres formations comme les Beatles ou dans une moindre mesure les Stones, les Byrds n'ont jamais été un groupe très stable en terme de line-up. Le seul membre permanent fut Roger McGuinn, le guitariste aux lunettes rectangulaires et au merveilleux son de 12 cordes. À l'inverse de The Fall (Mark E. Smith aurait dit quelque chose comme ta grand mère et moi c'est The Fall) les Byrds n'ont cependant pas été un prête-nom pour le seul McGuinn, chaque grande époque a ainsi vu l'émergence de super songwritters en plus des excellents contributions de Roger que nous aurions tord de négliger. Cette remarque en soulève une autre: les Byrds sont avant tout connus pou des reprises, en particulier de Dylan (Mr Tambourine Man ou My Back Pages) et savaient pourtant écrire de fabuleuses chansons...Parmi les songwritters les plus reconnus figurent en bonne place le facétieux David Crosby, sa moustache de gaulois, ses tenues d'elfe et le ténébreux beau gosse Gene Clark. Moins identifié Chris Hillman fut pourtant une pierre angulaire du groupe notamment sur mes deux albums fétiches.

 De g. à dr.: Crosby (gtr), Hillman (basse), Clark (tamb.), Clarke (bat.), Guinn (gtr 12)

Cette ouverture du groupe en terme d'écriture a certainement contribué à l'évolution passionnante de la musique des Byrds au long de la décennie. La formation fut en effet à la pointe de nombreux genres musicaux en quelques années seulement: des débuts folk-rock jusqu'à la country-rock en passant par le rock psychédélique qu'ils contribuèrent largement à définir avec le génial "8 miles high" en 1966. Mais revenons en un an plus tôt, le 12 avril de cette année là, les californiens publient leur premier single (certes précédé par le simple des Beefeaters en 1964), une reprise de Dylan ("Mr Tambourine Man") accompagné d'une composition de Gene Clark ("I knew I'd want you"). Le 45 tours est l'acte fondateur du folk-rock, il est certes devancé de quelques mois par "Laugh Laugh" des Beau Brummels, mais à l'inverse de ce dernier très marqué par la British Invasion, il contribue à créer une réponse américaine aux Beatles sans complexe vis à vis des Liverpuldiens. Il y a surtout LE son, celui des rickenbackers 12 cordes carillonnantes jouées en arpège...Le jangle est né ! Bien sûr, il existe des précédents ("Words of Love" de Buddy Holly, "what you're doing" des Beatles, "Needles & Pins" des Searchers), mais aucun ne met autant en valeur les 12 cordes et ne créé de fait un courant... Le son jangly ne doit pas être confondu avec d'autres sons clairs de guitare, notamment le twangy cher au Rock & Roll et à la Country: le jangly tire profit des demi-caisses des Rickenbackers, des cordes sympathiques (wikipedia), du chorus créé par l'accordage dans la même octave des cordes les plus aiguës et enfin est généralement compressé pour augmenter la portée du sustain, le tout avec un réglage très clair des amplis (voir directement dans la console) et surtout pas de saturation ou de crunch... Il en résulte ce son absolument magique, limpide, cristallin et si beau qui caractérise les disques des Byrds. Bien sûr ces derniers furent grandioses pour magnifier la sonorité en y amenant cette sensibilité folk américaine qui les caractérisent (jeu en arpège etc.)... 

"All I really want to do", second simple du groupe, précède de quelques jours la sortie du premier album des Byrds. Il suit les recettes de "Mr Tambourine Man" en associant une reprise de Dylan et une composition de Gene Clark, placée en face B, l'incroyable "I'll Feel a whole lot better". Le titre original est devenu un classique du groupe: il n'a pas le statut de tubes comme peuvent l'être "8 miles high" "turn turn turn" ou "I wasn't born to follow" mais jouit d'un culte chez les nombreux amateurs des Byrds. Il faut dire que la chanson est un bijou de pop typique de la première période de la formation. Dès les premières secondes, le motif de guitare jangly provoque les premiers émois, la voix country laidback de Gene continue de saper vos dernières résistances, les harmonies typiquement byrdsiennes du refrain vous enchantent et enfin le solo de guitare si original vous porte l'estocade. Très judicieusement inspiré de "needles & pins" des Searchers,  ils sont ainsi nombreux à avoir repris "I'll feel a whole lot better", des Flamin' Groovies (youtube) à The Coral (youtube) en passant par Tom Petty (youtube), autant de témoignages de l'énorme influence du groupe sur de nombreuses formations géniales.

jeudi 19 mai 2016

Johnny Hallyday ne prend pas de vacances

En rédigeant le dernier sujet de ce blog, j'ai cité "Noir c'est Noir" de Johnny Hallyday. Vous vous souvenez peut-être que j'avais évoqué il y a quelques années les morceaux instrumentaux du 45 Tours, interprétés par son groupe franco-anglais les Blackburds (archive). En fouillant les recoins de ce site fort bien fourni avec le temps (nous approcherions des 1000 articles murmure la régie), il n'a jamais été question de défendre directement le plus français des belges (ou le plus belge des suisses!). Il était temps de rendre hommage à ce monument du Rauque (fort) français qui malgré bien des défauts (vous les connaissez aussi bien que moi) impressionne par la longévité de sa carrière et son énergie sur scène. 

Vous l'avez remarqué, je n'ai pas insisté sur sa discographie, elle oscille entre peu attrayante pour l'esthète snob que je suis et franchement très cool. Cela peut surprendre, mais notre star nationale a enregistré d'excellentes choses ! Il y a bien sûr sa période twist/rock & roll , je ne la maîtrise pas assez pour vous dénichez ici les moments de bravoures d'Hallyday, mais il y en a sachez-le. En revanche j'ai eu un peu plus l'occasion de fouiller dans la seconde moitié des années 60 et je suis plutôt content de ce que j'y ai pêché. Là une très bonne reprise de "Hush" (francisé en "Mal"), meilleure probablement que la version de Deep Purple, ici d'honorables covers de soul de "Knock on wood" et bien sûr le rock chauffé à blanc, limiteurs dans le rouge, d' "À tout casser" (youtube). Autre temps fort de cette seconde moitié des années 60: "Psychedelic".

Resituons l'effort: 1966 marque l'arrivée en force d'une nouvelle génération de chanteurs, qui à l'inverse de leurs ainés, composent leurs propres morceaux. Antoine, Nino et Dutronc ringardisent ainsi les yéyés qui se contentaient souvent de reprendre les succès anglo-saxons en français. Antoine pousse le vice jusqu'à vouloir mettre Johnny en cage à Medrano (wikipedia), ce dernier lui répondra du tac au tac "Cheveux longs, idées courtes". Les déjà vétérans Johnny, Eddy et Dick doivent ainsi se réinventer: le rock & roll et le twist qui ont fait leur renommée appartient au passé et n'est pas encore assez ancien pour faire l'objet d'un revival (qui interviendra quelques années plus tard avec Sha Na Na mais aussi Au Bonheur des Dames en France). Si les intéressés sauront adaptés la soul music à la popularité grandissante, ils tentèrent, plus ou moins adroitement, de coller aux tendances. Il est ainsi rafraichissant de constater l'effort de Johnny en 1967 pour coller à la mode hippie fort éloigné du look blue jeans de ses premières années. Hallyday fait le même virage discographique en reprenant "San Francisco" du one-hit wonder Scott McKenzie (mais écrite par John Phillips des Mamas & Papas). Le résultat, sans être honteux, ne fait pas honneur aux qualités du rockeur français: le bagarreur devenu pacifique pour la (bonne) cause... de là à inspirer "Hippie Hippie Hourrah" de Dutronc ? Peut-être, néanmoins, vous le savez déjà, le temps fort de l'EP est ailleurs... 

"Psychedelic" est la bombe atomique du 45 Tours. Co-écrite par Johnny avec l'aide de Mick Jones, Tommy Brown (les lascars à l'origine du classique popsike/freakbeat "the Bird" - youtube) et du parolier Georges Aber et enregistré à Londres sous la supervision de Glyn Johns, la chanson est un monument de garage psychédélique francophone. C'est en partie grâce à Jimmy Page: l'infatigable session-man (la preuve) illumine la composition d'une fuzz fantastique ultra énervée. La prestation de Johnny est cependant impeccable. "Psychedelic" carbure plus aux amphets qu'à l'herbe: speed et violent comme une descente de trip, une grosse baffe sonique.

mardi 17 mai 2016

Georges Raudi et son orchestre font groover la face B

Disque bien connu des bacs pas chers, ce 45T de Jacques Dutronc est plus mémorable pour sa face B instrumentale que le générique proposé en A. Si de 1966 à 1968 le parisien est au top de sa forme et presque toujours pertinent, par la suite les choses se compliquent: entre variété blague et bons morceaux ("à la queue les Yvelines" ou "Je suis content"), il devient plus difficile de s'y retrouver..."L'Arsène" est ainsi clairement sans grand intérêt, du Dutronc petit bras, loin de sa verve et la férocité des disques de ses classiques de 1966. Le 7 pouces présente néanmoins un réel intérêt grâce à "Stercock" un titre instrumental de bonne facture signé Georges Raudi et son Orchestre. Ce dernier, généralement orthographié Georges Rodi (voir sa page discogs), a participé à l'excellent groupe instrumental Les Schtrumpfs (discogs) en tant qu'organiste. Il pourrait avoir également participé au groupe progressif Sandrose (issu de la super formation Eden Rose), cependant il n'est pas crédité pendant l'enregistrement du LP, cette information reste donc conditionnelle.

La pratique consistant à caler un instrumental pour compléter un 45 tours semble assez commune. J'ai en tête au moins deux autres exemples. En 1966, les Blackburds occupent la moitié de l'EP "Noir c'est Noir" de Johnny, selon toutes vraisemblances pour des raisons assez dures (je vous laisse chercher l'information). La même année, le premier EP des Charlots (ex-Problèmes) comporte également son lot d'instrumentaux de bonne facture: à n'en pas douter au départ la chanson avec le fameux "Chauffe Marcel" était considérée comme une pure récréation et il n'avait pas été envisagé que le disque puisse autant cartonner (surtout que le groupe sérieux peinait à marcher comme les collègues de labels Dutronc ou Antoine). J'imagine donc qu'il a été pioché ou composé en vitesse des instrumentaux pour compléter le disque et pouvoir le sortir en EP... Ainsi il n'est même pas certain que les Problèmes jouent effectivement dessus ! 

Sur le 45T de Dutronc: pas de problèmes, l'auteur et interprète est bel et bien crédité, le fameux Georges Raudi que nous mentions au début de cet article. Je n'ai pas d'informations pour détermnier si le morceau est extrait de la BO de la série ou s'il a été spécialement composé pour le 45T. Peut-être s'agit encore une fois d'un morceau pioché quelque part pour remplir une face... Dans tous les cas, en 2016, il est possible de s'en réjouir car "Stercock" est la vraie surprise et la meilleure face de ce simple: un instrumental groovy dominé par un piano et d'excellente facture dans la veine du Googie Rene Combo ou de Booker T and the MGs par exemple. Le riff de guitare ressemble d'ailleurs pas mal à "Soul Finger" des Bar-Kays (moins l'instrumentation qui ne fait pas appel aux cuivres). Peut-être pas un indispensable mais un super titre que vous pouvez trouver très facilement pour une somme dérisoire !


dimanche 15 mai 2016

Sparks: la ville leur appartient

Longtemps les premiers cycles des années 70 furent ma hantise, un repoussoir à l'amateur de garage et de pop baroque que j'étais (et suis toujours!). J'avais à  n'en pas douter une image faussée de ce qu'est réellement le début de cette décennie. Je n'y voyais que ce rock conquérant et plutôt barbant que représente Led Zep' ou Deep Purple, éventuellement du rock progressif tout aussi lénifiant et prétentieux, idéalement avec une pochette de Roger Dean (Oui je parle de toi Yes)... J'étais jeune, j'avais besoin de me confronter à un ennemi, fut-il un peu trop monté en épingle pour apparaître plus féroce qu'il ne l'est réellement. En effet, j'ai appris à dissocier ces groupes de leur aura, j'ai ainsi pu aimer ce qu'ils étaient (dans une certaine mesure) en me détachant de ce qu'ils représentent aux yeux de beaucoup et qui m'horripile tant: des figures mythologiques vénérées comme le veau d'or, des vaches sacrées sur lesquelles il me tardait de blasphémer. Au fond il était peut-être plus question de guerre de religions que de défendre le libre arbitre: les années soixante peuvent à bien des égards devenir un culte de dévots zélés tout aussi peu ouverts sur le monde extérieur que les amateurs de Led Zep qui ne jurent que par le Jack Daniel's et la Les Paul gold top... Je ne prétends pas être totalement sortie de la chapelle sixties (mais en ai-je réellement envie?) cependant j'ai su, je l'espère, m'ouvrir à d'autres sensibilités...

Je suis ainsi tombé sous le charme d'une certaine pop 70s, loin d'être en rupture avec la précédente décennie, celle continue d'explorer des chemins ouverts quelques années plus tôt. Parmi mes figures favorites (et mon panthéon pop personnel) apparaissent ainsi ELO, Roy Wood (Wizzard), Emitt Rhodes (ex Merry-Go-Round), Big Star, Badfinger, Raspberries et bien sûr Todd. Parlons-en tiens du père Rundgren...Membre éminent des Nazz, l'américain créa une des plus passionnantes discographies des années 70 autour de fantastiques classiques comme "A Wizard A True Star" ou "Something / Anything ?", son label édite également un petit groupe californien (de Los Angeles): Halfnelson. Cette formation est une affaire de frangins, elle comporte ainsi deux fratries: les Mael (Ron et Russell) bien sûr mais aussi les Mankey (Earle et Jim). Devenu Sparks, le groupe sort deux albums pour le label de Todd avant que les frères Mael ne décident d'aller s'installer à Londres, Earle resté à LA produira (parmi d'autres comme 20/20 ou les Paley Brothers) quelques années plus tard, en 1976, "Mondo Deco" l'unique album de The Quick (blog) dont la ressemblance avec Sparks est frappante ! Signés par le label Island, Ron et Russell remontent la formation avec des musiciens du cru. Ils sortent en 1974, leur troisième album et grand classique "Kimono My House". Le disque est produit par Muff Winwood ex-Spencer Davis Group (et frère de Stevie Winwood évidemment), l'intéressé enregistrera l'année suivante un disque culte de powerpop: l'unique album des Milk N Cookies. "This Town Ain't Big Enough For Both Of Us" est LE single extrait de l'album qui permet aux Sparks de percer. Deuxième des charts anglais (quinzième en France), la chanson est un énorme succès mérité tant le morceau est original et imparable. Les frères Mael déboulent en effet avec une pop baroque voir rococo altière et scintillante: le chant de Russell est théâtral et excessif quand la composition de Ron est tout en cassures et crescendos délirants. Sparks est ainsi un lien intangible entre la pop aux inflexions classiques de Left Banke et le rock lyrique de Queen, la formation évoque aussi la pop post-Beatles d'ELO ou le glam rock déviant de Roxy Music. Follement plus vrillé que Michael Brown et ses accolytes, plus élégant que les dégoulinants soli de Brian May: Sparks est cependant unique.

vendredi 13 mai 2016

Telex: une vision pour l'Eurovision

Demain aura lieu la finale du concours de la chanson de l'Eurovision en Suède (wikipedia). La première édition fut organisé en Suisse en 1956. L'événement, retransmis dans de nombreux pays, était à l'époque une prouesse technique, elle marqua ainsi de nombreux européens (wikipedia). Aujourd'hui si dans quelques pays le programme garde une certaine aura, il est devenu particulièrement ringard en France, un équivalent ponctuel des dimanche en compagnie de Jacques Martin... Soyons honnêtes: c'est peut être en partie du à notre manque de victoire depuis 1977, l'année de Marie Myriam. Reconnaissons cependant que la variété kitsch qui y est généralement proposée est assez laide et peu plaisante. Le concours est donc rarement pris au sérieux ici et nous y envoyons nos talents - parfois second degrés histoire de ne pas avoir à regretter - au casse pipe. Rassurons-nous sur un certain nombre de points (que ne nous donne pas les autres pays): une victoire dans l'Eurovision ne signifie plus grand chose depuis bien longtemps. D'ailleurs êtes vous capables de citer des artistes ayant gagné ce célèbre concours ? Pour ma part spontanément il m'en est venu deux. Ironiquement, aucune n'a chanté pour sa nation d'origine: Céline Dion (canadienne rappelons-le) en 1988 pour la Suisse et surtout France Gall en 1965 pour le Luxembourg (et oui!) avec l'incroyable "Poupée de Cire Poupée de son". Bref la seule chanson mémorable française à avoir gagné ne l'a même pas été sous notre bannière ! En regardant de près les vainqueurs quelques autres évidences me sont apparues (ABBA par exemple) mais dans l'ensemble ce n'est pas fou voir assez déprimant.

L'une des rares chansons de l'Eurovision que je trouve géniale a fini avant dernière l'année de sa présentation gagnant quelques modestes points grâce à la Grèce, la bien nommée "Euro-Vision" du groupe belge Telex. Ce trio composé de Marc Moulin, Dan Lacksman et Michel Moers est particulièrement connu des amateurs pour leur classique synthétique "Moskow Diskow". Il démarra un peu au hasard sur une blague: une  reprise de "Twist à St Tropez" dans la lignée de ce que fera un peu plus tard les Silicon Teens de Daniel Miller (wikipedia). Le groupe est un des enfants les plus doués des allemands de Kraftwerk. À l'humour froid et distant des robots, les Belges ajoutent une certaine douceur et légèreté tout en conservant certains traits du son germanique. "Euro-vision", ironiquement un de leurs plus grands succès commerciaux, est ainsi une chanson enjouée et futuriste au texte dans la lignée de "Trans Europe Express" vantant les mérites du concours. Par certain coté cette participation serait aujourd'hui considéré comme un trollage en règle, pourtant je ne suis pas certain qu'elle soit entièrement ironique et qu'au fond les intéressés n'auraient pas aimé créer la surprise en gagnant le concours, une belle conclusion assurément mais les juges en ont décidé autrement ! Tant pis pour eux, personne n'écrira dans les prochaines semaines sur les autres participants de cette année-là, par contre Telex sera encore longtemps un groupe génial et chéri par plein de gens. Je vous laisse avec la vidéo d'archive du concours qui est un régal en soi (la présentation avant le passage du groupe est absolument délicieuse).

mercredi 11 mai 2016

The (English) Beat: miroir mon beau miroir

Le punk, au delà de ses qualités propres, généra quantité de musique intéressante: Post-Punk bien sûr mais également le mouvement Ska Revival. Ce dernier un succès populaire important, moins nihiliste et plus positif que le punk, le Ska Revival était en quelque sorte une réponse constructive (mais pas niaise ou naïve) à la crise: une énergie canalisée dans une musique revendiquant la fraternité (le damier noir et blanc du logo Two-Tone comme symbole d'unité entre noirs et blancs) et s'intéressant aussi aux problèmes sociétaux de l'Angleterre de Thatcher... Ainsi Post-Punk comme Ska Revival ont en commun d'avoir une dimension utopique: là où le punk pratiquait la politique de la terre brûlée, ces nouveaux venus eurent à cœur de construire une alternative musicale, mais aussi éventuellement politique. 

Two Tone fut incontestablement la plaque tournante de la nouvelle vague Ska, lançant de nombreux groupes parmi lesquels The Specials, The Selecter (blog), Madness ou encore The (English) Beat. Ces deux derniers ont en commun de quitter la structure créée par Jerry Dammers après un unique single. Si Madness rejoignit un autre label anglais essentiel, Stiff (Nick Lowe, The Damned...), The (English) Beat prirent l'initiative de créer leur propre label: Go-Feet. Il publia la discographie du groupe et accueilli quelques projets parmi lesquels le groupe The Congos (biographie).  

The (English) Beat connurent leur premier très gros succès avec le single "Mirror in the Bathroom" en 1980. Cette composition originale du groupe atteignit ainsi la 4ème place des charts anglais (wikipedia). Si nombres de traits du ska ont été conservés (la guitare en contretemps, le skank beat, le phrasé de la voix, les cuivres...) il y a quelque chose de résolument new wave et anguleux dans "Mirror in the Bathroom" peut-être dans l'usage du chorus sur la guitare... Ainsi la chanson m'évoque "Making Plans for Nigel" d'XTC mais en étant plus marqué par ses influences jamaïcaines. C'est peut être cette originalité qui rend "Mirror In The Bathroom" si cher à mes yeux: le titre épouse son époque et exprime les paradoxes liés à une recherche authenticité sans nier la modernité.

lundi 9 mai 2016

Blues Convention

Aujourd'hui était annoncé officiellement la fin de Magic après plus de 20 ans en kiosque et 201 numéros (le dernier avec Woods en couverture). J'ai eu la chance de pouvoir y contribuer pendant plus de deux ans, c'est d'ailleurs un peu grâce à ce blog que tout a démarré. Avant d'être dans l'aventure j'ai été un lecteur fidèle (abonné) pendant plusieurs années, j'appréciais particulièrement dans Magic la qualité des plumes: ce qu'il faut de style et d'élégance, sans non plus tomber dans la démonstration et l'hyperbole gratuite distribuée comme autant de goodies publicitaires sur le tour de France. J'aimais également beaucoup les choix éditoriaux forts: une défense de la musique pop qualitative sans pour autant se mettre d’œillères, cette capacité à défendre Mustang, Thee Oh Sees ou les productions de Bureau B avec le même engouement et la même précision. Enfin l'esthétique général était soignée, elle véhiculait à merveille la modernité que défendait le magazine. Magic était pour moi un repère, une référence qualitative et exemplaire. J'ai ainsi été très honoré de pouvoir rejoindre les pigistes. Ce fut aussi un défi personnel: habitué à écrire en flux tendu sur le blog (et souvent sans aucune relecture), être à la hauteur des autres rédacteurs fut un sacerdoce, j'appris ainsi à me relire à voix haute, à mieux ponctuer mes phrases (mon gros défaut !) etc. Je ne sais pas si je suis parvenu à l'excellence des autres rédacteurs, néanmoins je me fais d'avantage confiance et m'exprime à l'écrit avec bien plus d'aisance.

Avant d'être passé de ce coté-ci de la barrière, j'ai, avant tout, toujours été un fidèle lecteur de la presse musicale papier: Trax pendant mes années électroniques, Magic, Rock & Folk et parfois New Noise depuis (et je relis de nouveau Trax d'ailleurs). J'aime la presse musicale papier. Je fais parti de cette génération dont la culture musicale s'est en partie faite par le prisme des magazines de presse. J'ai ainsi fantasmé des disques avant de tenter de les acheter dans une Fnac. Tenter car les vendeurs n'y étaient déjà pas toujours compétents il y a une quinzaine d'années ! Au delà de l'actualité, un titre représente une communauté, des références communes partagées par le lectorat et les journalistes, ce sentiment unique de participer à une même histoire. C'était d'autant plus important qu'avant l'apparition des forums et des réseaux sociaux, il n'était pas toujours possible de partager, les magazines étaient donc ceux qui nous comprenaient, nous savions alors qu'il y avait ailleurs d'autres fêlés comme nous. Internet a évidemment bouleversé la donne ! J'en suis un excellent exemple: mon frère, un ami et moi même lancions ce blog il y a près de 10 ans (2007). Ce fut un formidable eldorado démocratique, d'un coup tout le monde pouvait s'exprimer sur le sujet qui l'intéressait et chacun pouvait partager avec l'autre ses passions.  La presse musicale de son coté se mangea (et continue pour ceux encore là!) une double crise: le papier et les disques. Ainsi elle perdit du lectorat et des budgets publicité en même temps, si un tel cataclysme venait à toucher l'industrie automobile, l'état rappliquerait vite-fait avec une mesure pour faire repartir la demande des ménages... Depuis des années, la presse musicale survit, souvent par la volonté de passionnés comme vous et moi qui font tourner la machine avec des bouts de ficelle et des budgets très serrés.

Au fond, nous pourrions adopter un point de vue schumpétérien sur ces questions: la destruction créatrice œuvre, la presse musicale s'en va, remplacée par une nouvelle technologie (internet, le numérique), c'est dans l'ordre des choses, du moins dans une civilisation capitaliste obsédée par la croissance. Peut-être est ce un peu vrai, mais au fond y avons nous réellement gagné avec la gratuité ? Internet devait être une libération et la source de connaissances presque infinies se révèle être assez décevant en 2016. Beaucoup de blogs, sites internet sont en jachère voire disparus des radars. Quelques webzines continuent un travail qualitatif (Gonzaï, The Drone et d'autres) mais ils semblent bien peu face à l'armada de sites clickbait dont le contenu est calibré pour piéger les moteurs de google et nous avec. Le paysage, en dehors des exceptions susmentionnées, est morne, conformiste, il digère les mêmes figures à l'infini, ne créé pas de contenus, de sens, de liant. La machine avale ce qu'elle a précédemment régurgité, créant un présent permanent qui efface toute notion d'histoire. Cette culture démocratique ouverte sur l'autre (partager sa passion) s'est aussi transformé en une oppressante course à la popularité: là où nous recherchions l'empathie il n'y a aujourd'hui que volonté de plaire à tous. L'internet de 2016 est ainsi à bien des égards à l'opposé de l'esprit qui l'animait à ces débuts. Il a fallu monétiser et donc trouver des modèles économiques. L'affaire n'est d'ailleurs pas tout à fait réglée: la gratuité s'est imposée partout et il est difficile de revenir sur cet acquis pour ceux qui veulent proposer autre chose. Cette gratuité a certainement contribué à privilégier la quantité sur la qualité: du clic facile, de l'audience volage et volatile sur des sujets légers et consensuels. Ne nions pas l'importance du rien mais quand il écrase le reste le déplaçant aux marges de l'internet, est-ce vraiment ce que nous désirions ? Bien sûr, il ne s'agit pas de faire le procès de ce merveilleux outil que peut-être la toile, elle me sert absolument tous les jours, pour découvrir de la musique ou compléter mes connaissances, mais l'usage que nous en faisons et ce qu'il a comme conséquence sur le réel interroge non ?

Je me fais certainement vieux , je passe progressivement du coté de ceux que le progrès inquiète, là où je devrais voir des potentialités infinies, je ne vois qu'un monde qui ne sait plus prendre le temps d'apprécier, qui ne s'interroge plus, consomme les choses (vivantes ou non) comme autant de pastilles de deux minutes saucissonnées ainsi pour continuer de capter le peu d'attention qu'il reste dans nos cerveaux suractivés par le vacuité. Il y a évidemment toujours de l'espoir, autour de moi des gens veulent monter des bons vieux fanzines, j'espère qu'ils le feront et je serai le premier à écrire pour eux s'ils le souhaitent ! J'espère vraiment de tout cœur me tromper sur le futur.

Norman Greenbaum: félicité pop

S'il existe un panthéon des one-hit wonders, Norman Greenbaum en fait assurément parti ! "Spirit in the Sky", son passeport pour la félicité, s'est en effet vendu à plus de deux millions d'exemplaires à la fin des années 60 (wikipedia) aux États Unis et dans le monde. Sorti en 1969, la chanson a pour thème Jésus: ironique quand on sait que l'intéressé est juif (sa biographie) ! Néanmoins cela coïncide aussi avec les débuts de la Jesus music (wikipedia) même si techniquement cela n'en fait pas parti.  Norman aurait ainsi essayé de s'inspirer du gospel tandis que la production, typique de l'époque, est franchement cool. La thématique relativement novelty de la chanson ne doit ainsi pas faire oublier une excellente composition bubblegum portée par une rythmique impeccable et une superbe ligne de fuzz. Un classique de brocante à ne pas rater donc à condition de ne pas être allergique à la thématique religieuse évidemment ! 

samedi 7 mai 2016

The Sound Specials: nederbiet

Voici une sympathique obscurité beat des Pays Bas, une nation particulièrement réputée pour la qualité de sa scène dans les années soixante au point d'avoir le droit à son appellation spécifique: Nederbiet (biet pour beat, neder pour Netherland). Dans les années 60 la Hollande est clairement un pays rock et comporte l'un des plus beau vivier mondial. Bien sûr impossible de rivaliser avec les deux grandes terres de musique pop que sont les États Unis ou la Grande Bretagne mais je serais tenté de considérer les Pays Bas sur la troisième marche du podium, y compris devant donc le Canada, l'Australie ou la Suède souvent considérés aujourd'hui comme d'importants foyers électriques. Il y a une raison à cela: la qualité et la profusion des groupes, celle-ci étant en parti du à la nature même du pays (de nombreux ports, n'oublions pas l'importance de Liverpool dans le développement du rock en Angleterre) et l’immigration d'une population indonésienne ayant constitué des les années 50 une scène rock & roll (Indorock). J'ai déjà évoqué ici quelques formations beat très connues (The Jay-Jays, les excellents Golden Earing avant leur virage hard rock, Rob Hoeke ou encore Zen), je me rends compte que je suis loin d'avoir fait le tour de la question, n'ayant jamais écrit ici (à ma grande surprise d'ailleurs) sur les excellents Q65, Outsiders ou The Motions... 

Il y a aussi des groupes plus obscurs, beaucoup de groupes. Parmi eux les Sound Specials de Goirle-Tilburg, auteurs de trois quarante cinq tours au milieu des années 60 dont deux promotionnels ! Cela laisse penser qu'il pourrait s'agir d'un faux groupe (des musiciens de studio se faisant passer pour une formation) mais j'aurais tout de même tendance à écarter cette hypothèse: la sortie d'un 45T en leur nom propre ainsi que le style musical plaide pour un authentique groupe beat. Je me suis récemment fait plaisir en achetant l'un de leurs 7 pouces sur discogs de 1966. Celui-ci est dédié à la promotion d'un métier dans le bâtiment ou l'industrie. Ainsi peut-on lire sur la pochette "moderne jeugd kiest een modern beroep" qui signifie "une jeunesse moderne choisit une profession moderne". Je n'ai pas réussi à identifier précisément la profession en question ("regulist") mais je pencherais pour contre-maître, inspecteur, peut-être en terme plus actuel: management de la qualité. La face A du disque fait en tout cas référence au métier en question, elle se nomme "Regulation" et est un sympathique instrumental bien qu'un peu anodin (youtube). La B en toute logique a largement plus mes suffrages ainsi que celui des compilateurs (compé deux fois en 1989 et 1999). "I wasn't satisfied", co-écrite par le chanteur (un certain Wim Sikkers), est ainsi un excellent titre beat enjoué et rythmé porté par une guitare électrique au son délicieusement twangy. 

jeudi 5 mai 2016

Los Flechazos: mini-Cooper

L'Espagne peut se targuer d'avoir eu une importante scène mod et garage revival à partir des années 80. Parmi les formations les plus connues: Brighton 64 de Barcelone ou un peu plus tard los Flechazos de Leòn. Ces derniers furent un des groupes les plus emblématiques du rock indé espagnol durant leur décennie d'existence (1987-1997). Ils éditèrent ainsi leurs disques sur quelques uns des labels les plus importants du pays comme DRO (fondé par l'excellent groupe Aviador Dro dont je parlerai un jour) ou Elefant (qui édita le premier EP de Los Planetas). Deux de ses membres sont à l'origine du fameux rassemblement mod Purple Weekend (site). Le groupe bénéficia aussi d'une certaine reconnaissance internationale publiant des disques sur un label mod anglais comme le disque que nous allons évoqué aujourd'hui.

Cet EP, de 1996 est l'une des dernières publications du groupe qui se sépara l'année suivante. Alejandro Diez Garin continue depuis dans la musique sous le nom de Cooper. Si la majorité de la discographie du groupe est en espagnol, notamment leurs classiques "a toda velocidad" ou "viviendo en la era pop", le groupe a également enregistré des reprises et des compositions originales en anglais. J'ai un petit faible pour le premier morceau de ce 45 tours paru sur Detour "One more Try". Léger et ondoyant, les espagnols proposent une pop psychédélique gorgée de soul, c'est très réussi. Il est très probable que nous revenions sur ce groupe prochainement tant il y a à explorer chez eux !



mardi 3 mai 2016

Los Faros: Seat 500

L'Espagne tient une place particulière dans mon cœur... Il y a quelques années de cela ce fut certainement le premier pays (en dehors de la France voir l'Angleterre) dont j'explorais les disquaires à la recherche de productions locales. Les premières pioches furent aussi les plus abondantes: tout était encore à faire ! Aujourd'hui mes bacs de 45 Tours ibériques sont bien garnis, je pense avoir facilement une centaine de disques, du coup découvrir de nouvelles choses excitantes et encore inconnues est devenu plus complexe... L'été dernier, probablement, je prenais un 45T de Los Faros sur un coup de tête, le prix était élevé (8€ comme vous pouvez le constater) mais la pochette bien trop intrigante pour ne pas me laisser tenter...

La surprise fut agréable, les deux titres de ce 7 pouces sont tout à fait cool et recommandable dans le genre beat/garage. Bien entendu ce n'est pas aussi décisif et fou que Los Salvajes (blog) ou Los Brincos (blog) mais c'est une prise bienvenue dans ma collection de rock 60s européen ! Le groupe était originaire de Barcelone lancé par le label Novola comme une version catalane de Los Brincos (qui partageait la même maison de disque), il a sorti 10 simples, un EP et un LP, une discographie conséquente pour une formation sur laquelle il est difficile de trouver des éléments biographiques au delà des noms des membres (lien). Leurs visuels évoquant l'autoroute (je pense que vous avez saisi la signification de leur nom héhé) sont carrément cool, notamment la photo utilisée ici légèrement floue et prise de nuit. "Ojos sin vida" (yeux sans vie) comme "A todo gas" (plein gaz) tiennent bien la route (pardon) toutes les deux. Ainsi la face A a un agréable coté garage avec son orgue criard (youtube) tandis que l'autre coté, qui a ma préférence, évoque d'avantage une version amateur de Los Brincos en amenant cette touche flamenco à leur musique beat relevée sans toute fois faire de l'ombre à la formidable formation madrilène.


dimanche 1 mai 2016

Prock Harson: le bal des reprises de A Whiter Shade Of Pale

L'été 1967 fut bercé pour nombre d'amours naissant par le slow langoureux au texte cryptique "A Whiter Shade of Pale" de Procol Harum (au cas où vous vivriez sur une autre planète, un lien pour l'écouter). Ce désormais classique reste, presque 50 plus tard, très très très efficace pour pécho. Le morceau est inspiré notamment d'un fameux air de Bach (celui ci a priori pas l'unique emprunt à notre célèbre compositeur) mais aussi du classique soul (et une autre artillerie lourde pour emballer): "When A Man Loves A Woman" de Percy Sledge sorti un an plus tôt (pour vous faire une idée). Le titre engendra son lot de reprises et fut un des premiers de la vague slow sur un air classique, un phénomène qu'il serait d'ailleurs passionnant d'étudier (de même que les reprises en rock instrumental ou plus tard chez nos amis les proggeux). Ainsi les chers Demis et Vangelis se firent connaître avec un classique de boom inspiré du Canon de Pachelbel: la dégoulinante "Rain and Tears". 

Il existe plus de 200 reprises de ce morceau, en français ("Les Orgues d'Antan" de Nicoletta), en italien ("Senza Luce" de I Dik Dik) ou encore en espagnol ("Con Su Blanca Palidez" par exemple par le groupe vénézuélien Los Impala). Nombre de reprises ne prirent même pas la peine d'une traduction et eurent comme ambition principale de surfer sur le phénomène et tromper le consommateur en jouant sur la consonance des noms. Une des plus célèbres tentatives est évidemment celle du groupe Proco Magnum. Les connaisseurs se délectent de la face B, le freakbeat sauvage de "Neurotic Saga" (youtube) plus connu en France par les Papyvores compilé sur la première Wizzz ("Le Papyvore" youtube). Sans être aussi dingue la face B de la reprise du slow langoureux de Procol Harum par Prock Harson se révèle être aussi une bonne surprise...

"I Wanna Live" est une charmante chanson groovy à la Georgie Fame ou The Peddlers, de la bonne came qui trouvera sa place à merveille dans un petit set à la cool. Je n'ai pas beaucoup d'info sur ce groupe, il semblerait que le canadien Billy Butler chante sur ce disque (lien). La formation a moins édité un autre disque aussi (discogs). Enfin, le 45T est sorti dans au moins deux pays, en Allemagne sur Cornet (également productrice du disque) et en Italie sur Stateside (pochette identique à l'exception du logo en haut à gauche). Je ne suis pas sûr que ce soit courant mais ça ne vaut pas pour autant cher: le disque n'est pas spécialement recherché/identifié.