Il m'est difficile d'écrire sur les Ready-Mades vu que je connais les intéressé-e-s ! Néanmoins ils viennent de sortir leur premier 45 Tours chez Soundflat (qui a aussi récupéré à peu près au même moment les Kumaris dont nous sortions un single sur Croque Macadam, il y a un an et quatre jours), un 4 titres également répartis entre français et anglais. Au delà de l'excellent catalogue de nos amis de Q-Sounds, le faible nombre de formations soul françaises les rapprochera forcément des Spadassins avec lesquels ils partageaient un membre commun. Cependant, les deux groupes ne se ressemblent pas tellement malgré l'usage alternatif du français et de l'anglais. Là où les Spadassins étaient une dream team de musiciens bretons de haute volée associant l'élégance mod, l'accomplissement instrumental à l'humour de Nino Ferrer, les Ready-Mades ont un coté plus punk, spontané et brut de décoffrage. Cela leur va très bien d'ailleurs, le groupe excelle sur scène et propose un rhythm & blues bagarreur et mordant, légèrement canaille et malpropre. Soundflat les rapproche de Nick Waterhouse, la comparaison n'est pas totalement aberrante en terme d'influences mais pourtant je trouve la musique des parisiens plus vive et pugnace... Les 4 titres sont d'excellente facture, je ne sais pas si l'enregistrement rend exactement compte de la puissance du groupe en live, cependant il s'agit d'une excellente carte de visite avec une petite préférence en ce qui me concerne pour le morceau Baleine ou Cigogne dont la thématique sérieuse (le harcèlement sexuel) est traité avec beaucoup de justesse.
jeudi 14 juillet 2016
mardi 12 juillet 2016
Une partie de Mikado
Mikado était un duo français formé de Pascale Borele et Grégori Czerkinsky. Ils ont sorti un unique album (Mikado) en 1985, celui-ci a la particularité d'avoir été produit par un label japonnais (Non-Standard, créé par un des membres de Yellow Magic Orchestra) avant d'être pris en licence en France par Vogue alors proche du dépôt de bilan. Le duo sort un premier single en 1982, un an après leur rencontre, sur le label underground Les Disques du Crépuscules. Ce disque leur permet de participer à une tournée au Japon et d'aboutir donc quelques années plus tard à l'enregistrement de Mikado.
Naufrage en Hiver (single extrait de l'album) est un des morceaux les plus connus du duo, il est aussi très représentatif de l'univers du groupe: l'esthétique vive, camp et pop de Pierre et Gilles, des arrangements délicats et synthétiques, au service de textes légèrement précieux, mais sans manquer d'un petit peu d'autodérision et de douceur. Mikado a beaucoup été comparé à d'autres duos (Elli & Jacno ou les Rita Mitsouko), pourtant ils sont uniques, leur musique est moins immédiate et frontale, plus subtile aussi. Elle a un je ne sais quoi de charmant, étrange et un peu désuet, naufrage en hiver et ses colliers de varech en sont une excellente illustration.
dimanche 10 juillet 2016
(Sans) Rancune
Juvenile Deliquent (bandcamp) est un label nantais au catalogue plutôt orienté punk en général. On leur doit notamment deux 45T et l'album d'Asphalt ainsi qu'un split 45T de l'excellent groupe powerpop Protokids. Leur dernière sortie, un 45 Tours (mon format préféré et malheureusement de moins en moins fréquent...) du groupe Rancune (installé à Berlin?) se place dans un tout autre registre: celui d'une synth-pop tirant volontairement sur les années 80, aux boites à rythmes analogiques, lignes mélodiques synthétiques et mécaniques... Le truc pourrait virer méchamment à l'exercice de style mais le groupe s'en sort plutôt bien en particulier sur la très réussie face B en français Putain de Problèmes. Les paroles contribuent pleinement à ce succès: elles sont drôles, justes et évoqueront ainsi à tous des situations vécues. L'humour du morceau, l'excellent travail sur les voix apportent ainsi une fraîcheur et une originalité bienvenues à un genre parfois un peu trop sérieux. Bref un excellent morceau qui justifie pleinement l'achat de ce 45 tours !
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mardi 5 juillet 2016
(Pas encore un) Requiem Pour un Twister
Il y a neuf ans nous lancions Requiem Pour Un Twister, l’enthousiasme des débuts se traduisit par une première année au rythme très soutenu (plus de 200 sujets postés en 2007 à trois). La seconde année fut plus molle, le bouillonnement des débuts laissa place à une légère usure, celle que l'on ressent quand on a le sentiment de faire des choses cool mais parfois dans le vide peut-être...
Dès 2009 et jusqu'à 2013, le blog Requiem Pour Un Twister fut à son apogée: nous nous reconnectâmes avec l'actualité et la défendîmes ardemment ici. Le rythme de publication était bon et régulier. La nouvelle vague garage (Ty Segall, Jay Reatard, Oh Sees, Black Lips, Fresh & Onlys, Woods...) nous porta ainsi bien plus que l'indie-rock des années 2000: ces groupes partageaient cette même obsession pour les sixties sans vouloir les pasticher. La présence massive de disques publiés entre 2010 et 2013 dans les mots clefs sur le coté (This Year's Model) en est certainement la plus belle illustration, tout comme nos tops albums 2011 et 2012.
2014 et 2015 furent des années plus calmes mais heureusement pas tout à fait blanches: la seconde s'en rapprochant dangereusement, je n'écrivis alors que sur nos propres sorties. Les priorités n'étaient plus les mêmes, notre activité se porta (et se porte toujours bien !) sur les labels (Croque Macadam et Requiem Pour Un Twister), par ailleurs je fus aussi pigiste pour Magic entre février 2014 et avril 2016, jusqu'au dernier numéro avec...Woods en couverture. Les piges me permirent ainsi de défendre la musique qui est au cœur de ma passion (et de l'esthétique de ce blog) depuis des années et je suis ravi d'avoir pu donner un peu d'espace pour défendre des groupes français comme Volcan, Pointe du Lac, Cathédrale, Ben Kerber, Requin Chagrin, Neue Grafik...
La fin du mensuel fut ainsi une opportunité pour reprendre ici et parler notamment de oldies ce qui me manquait énormément. J'aime l'idée de faire communiquer le passé avec le présent, d'écouter les productions anciennes au regard de la vision de 2016. Le monde des oldies anglosaxon est très bien défini, c'est nettement moins le cas ailleurs, y compris dans le domaine francophone. J'ai ainsi ressenti cette absence en faisant des recherches pour compléter ma collection: l'offre éditorial en matière de musique ancienne non anglo-saxonne sur internet n'est pas pléthorique. J'ajouterai même que le patrimoine français est souvent méconnu voir ignoré ici. Certes, nous n'avons jamais été aussi productifs que les américains ou les anglais mais en creusant un peu on les trouve ces groupes qui redorent nos couleurs. Le plus drôle c'est que c'est aussi le cas de nos voisins européens: il y a de super groupes espagnols, italiens, allemands, polonais, tchèques, yougoslaves, belges, suédois, islandais, hongrois, grecques, néerlandais...
(Pas encore un) Requiem Pour Un Twister est ainsi la millième publication du blog (!), honnêtement nous n'aurions probablement pas imaginé en arriver là neuf ans plus tôt. Tout comme nous n'aurions pas envisagé créer deux labels et sortir plus de 30 disques différents en tout (33 exactement avec les trois à sortir le 8 juillet), ni organiser plein de dj sets au Motel ou à la Mécanique Ondulatoire et les nombreux concerts auxquels nous avons parfois contribué. Cependant, avons nous encore assez de jus pour aller jusqu'à 2000 sujets postés ? Je ne sais pas, je ne pense pas, écrire est une activité chronophage et aujourd'hui tout seul à encore y consacré du temps ici, je n'imagine guère y parvenir, qui sait ce que me réserve les prochaines années ? Il s'est déjà passé tant de choses depuis 2007 ! Au fond l'une des rares choses constantes dans le temps fut notre amour et notre passion pour la musique et le besoin irrépressible de partager cette envie, de faire connaître et découvrir ces groupes qui nous émeuvent et transcendent pendant quelques courts instants notre existence...
(Pas encore un) Requiem Pour Un Twister car s'il était tentant de faire un bilan de cette presque décennie d'activisme musical, ce n'est certainement pas terminé: l'actualité des labels est excellente et comprend des sorties jusqu'à la fin de l'année au minimum (nous avons 4 albums en projet). Quant au blog, j'ai encore énormément de groupes, morceaux à vous faire découvrir, ma collection de disques se porte très bien et je continue de découvrir toutes les semaines des morceaux fascinants dont certains seront évoqués ici à n'en pas douter. Grande nouveauté je tiens aussi cet été une émission sur Radio Campus Paris et hasard des calendriers le premier numéro est à écouter ce soir de 20h à 21h ! En attendant fêtons comme il se doit ces milles articles avec la chanson qui a donné naissance d'une certaine façon à ce blog puis au label: Requiem Pour Un Twisteur du grand Serge Gainsbourg. Donnons nous rendez vous pour les dix ans en avril prochain, et peut-être un jour pour les 1500 articles ?
dimanche 3 juillet 2016
Plus vraiment Soft mais plus Machine que jamais
Les algorithmes sont aussi fascinants qu'agaçants: ils peuvent vous glisser d'affreuses peaux de bananes sur la route sinueuse de la découverte mais sont aussi capables de vous surprendre ponctuellement. Je consulte ainsi de temps en temps les playlists de Spotify, à ce jour je n'y ai fait aucune réelle découverte mais j'ai pu apprécier que ce satané ordinateur était capable d'identifier une partie de mes goûts avec une précision étonnante. Citons en vrac dans celle de cette semaine: The dBs (blog), Todd Rundgren, Make Up, Ultimate Painting, Miracle Religion (avec mon morceau préféré all the best) etc. Pointu et cool !
Les algorithmes se plantent aussi parfois sévèrement, ainsi Spotify est-il convaincu que j'aime les tubes de variété parce que j'écoute certains titres (précis) de chanteurs français, ils me proposent ainsi un hit disco de Dalida, supposant qu'ayant écouté Monty, Johnny ou Nino cela devrait être ma came. Les algorithmes n'arrivent donc pas ici à identifier mon comportement d'écoute car il est probablement noyé dans une masse d'informations ne faisant pas la subtile distinction que j'opère. Pour prendre un exemple un peu analogue, il suffit de regarder la liste des recommandations pour les Beatles sur last fm , les choix se portent naturellement sur des groupes très écoutés comme les Beatles plutôt que sur des groupes ressemblant aux liverpuldiens comme pourraient l'être les Searchers, Gerry and the Pacemakers etc. Ainsi les Hollies apparaissent-ils après Led Zeppelin.
Soyons honnête, je ne pense pas les algorithmes d'aujourd'hui pas capable de précéder le travail humain d'analyse et de rapprochement, c'est à dire le conseil du disquaire, le partage entre passionnés, les chroniques de disques, les compilations, les playlists etc. cependant la qualité des recommandations bénéficient aujourd'hui d'une acuité surprenante voir troublante. Le développement de l'intelligence artificielle n'en est ainsi qu'à ses débuts et le deep learning laisse entrevoir un futur peut-être dirigé par Bêta Gamma l'Ordinateur... Il risque en tout cas d'améliorer la qualité des recommandations, peut-être en analysant directement la musique (accords, instruments, tempo...).
Revenons-en à nos moutons... Cette longue digression m'amène à une excellente découverte effectuée grâce à un algorithme et aux écoutes d'autres internautes sur youtube: Soft Space de Soft Machine. Le morceau s'en effet naturellement enchainé à une de mes écoutes récentes: Chaos de Quartz. Je ne sais pas si les deux titres sont dans la même veine, il est évident en tout cas que Soft Space des britanniques est exactement dans ce que j'ai envie d'écouter (électronique, planant, abstrait, voir cosmique...) et une très belle découverte ! Le morceau est une rencontre fantasmée entre Moroder (l'influence d'I Feel Love sur la basse me semble évidente) et des séquences songeuses et mouvantes de Tangerine Dream période Phaedra avec un soupçon de Terry Riley peut-être... Autant dire que la chose a de quoi m'émoustiller mais en revanche elle énerve profondément les amateurs de Soft Machine. En effet à l'époque d'Alive and Well (l'album sur lequel figure ce morceau également publié en single - coupé en deux parties assez harmonieusement), le groupe britannique ne ressemble guère à la formation majeure de l'école de Canterbury qu'elle était une décennie plus tôt. Il ne reste aucun membre de la formation originale, Karl Jenkins en est le leader mais il n'est évidemment pas aussi apprécié que Wyatt, Ayers, Allen, Hopper ou Ratledge... Pour ne rien arranger à son cas, le Karl a commis une bien vilaine chose dans les années 90. Mais voilà, que ce ne soit pas le Soft Machine original ou que Karl se soit perdu en chemin importent au fond peu. Soft Space est un super morceau électronique, hallucinant pour 1978 et d'une modernité que n'a pas forcément tout le répertoire plus jazz rock du groupe ! Concluons sur une boutade: pensez vous qu'un algorithme va désormais associer Monty et Soft Machine ?
vendredi 1 juillet 2016
Ultimate Painting ne fait pas de la figuration
Ultimate Painting et Woods ont réalisé une tournée commune et afin de célébrer l'affaire, leurs labels respectifs (le génial Trouble In Mind et Woodsist) ont édité ensemble un 45 tours. Ainsi chaque groupe occupe une face avec un titre inédit.
Know Your Minute des américains de Woods est un honnête titre, une face B qui fait le job mais ça sent un peu le morceau écarté de With Light and With Love. La production évoque en tout cas d'avantage le précédent effort de cette fabuleuse formation que leur récent ouvrage au son ambitieux... City Sun Eater In the River Of Light a en effet tout d'une rupture avec une certaine idée du groupe, celle que nous défendions ardemment dans ces pages depuis cinq ans et l'excellent Sun & Shade (blog). Peut-être pas un adieu définitif mais beaucoup d'interrogation, puisse le prochain album nous refaire tomber amoureux de ces outsiders magnifiques.
Into the Darkness d'Ultimate Painting est la merveille du disque, peut-être même une des meilleurs compositions du groupe. N'ayant jamais évoqué ici cette passion revenons un peu sur le duo anglais. Formé par Jack (de Mazes) et James (ex-Veronica Falls et actuel Proper Ornaments), le groupe aligne les compositions délicates dans lequel les guitares s'entrelacent et les voix se marient avec précision. Leurs deux albums sont excellents, avec peut-être une légère préférence pour le premier et sa fraîcheur. Depuis leurs débuts, les anglais ont cette faculté d'arriver à faire quelque chose de personnel avec des références qui pourraient être pesantes pour beaucoup d'autres formations (le Velvet Underground en tête). Si leur musique est sobre voir raide à première vue, une écoute attentive en révèle l'absolue beauté, Ultimate Painting écrit de super chansons et Into the Darkness en est une magnifique illustration. Less Is More avait coutume de dire Ludwig Mies van der Rohe, la maxime semble aussi parfaitement rejoindre les aspirations du duo anglais.
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