dimanche 30 octobre 2016

Les Variations

À mon grand étonnement je n'ai jamais évoqué ici les Variations l'une des formations les plus mythiques du rock français ! Réparons cette injustice en évoquant l'un de leurs meilleurs simples Come Along paru en 1969...

Les Variations se forment en 1966 à Paris autour de Marc Tobaly (guitare), Joe Leb (chant), Jacky Bitton (batterie) et Jacques Grande (basse). Le groupe entretient une relation particulière avec le Maroc puisque Tobaly est originaire de Fez tandis que Jo et Jacky sont de Casablanca. Nous devons aussi au Maroc l'excellent groupe Golden Hands, dans une mouvance proche des Variations d'ailleurs. Le groupe tourne beaucoup en Europe et enregistre un premier 45 tours au Danemark en 1967 avec deux reprises Spicks & Specks écrite par Barry Gibb des Bee Gees et Mustang Sally popularisée par Wilson Pickett. Un disque désormais très recherché mais globalement un peu anecdotique à mon goût. Néanmoins le groupe n'abandonne pas et au réveillon 1968 le groupe donne une époustouflante prestation à la télévision française ! Le groupe rodé par de nombreux concerts affiche un magnétisme troublant notamment le duo Lebb/Tobaly évoquant une autre paire et pas des moindres: Jagger/Richards... 

Remarqué par Pathé, le groupe peut enfin publier des disques en France, le premier d'entre eux est un classique immédiat Come Along. Le 45T est parfaitement dans l'air du temps, il évoque ainsi autant Cream que Led Zeppelin, c'est à dire ce court instant où le blues devient hard rock pour le bonheur des adolescents. Plus véloce et rock & roll que la bande à Plant et Page, les Variations y sont impériaux, ils maitrisent leur sujet avec une grâce unique. Cela fouraille sévère autour d'un riff simple et efficace, Lebb s'ébaudit en diable, Tobaly a les mains en feu tandis que Jacques et Jacky tiennent la cadence sans défaillir. Le groupe signe ainsi dès son second simple un instant classic du rock français. 

La suite immédiate est tout aussi recommandée: les simples suivants démontent (Générations ou What's Happening...) de même que leur premier album Nador un classique incontestable du rock français. Le groupe va par la suite connaître une trajectoire étonnante en signant notamment sur le label américain Buddah Records et en étant interviewé par un certain Lester Bangs, mais ceci est une autre histoire, assez éloignée de Come Along !

Plus d'informations sur les Variations: Rock Made In France / Paris70  

I

vendredi 28 octobre 2016

Bruits Défendus N°001

Comme tout bon collectionneur qui se respecte j'ai tendance à être un peu complétiste sur les bords... Ainsi mon intérêt pour les Stilettos m'a-t-il fait acheté l'ensemble de leurs sorties... Celle que je vous présente aujourd'hui est un peu particulière, Les Bruits Défendus N°001 en plus d'être le dernier témoignage discographique des rockeurs bordelais est surtout un sampler 4 titres d'autant de groupes du cru: Stilettos, Scurs et Les Exemples pour la capitale d'Aquitaine et les Flamingos de la plus bretonne des villes de Loire Atlantique (LA, Ouest Coast pour les intimes...). 

Édité en 1984 par ce qui semble être une émission radio (sur Radio Angora) géré par un certain Bruno Select, ce 45 tours est un témoignage intéressant sur le rock underground de ces années là, très complémentaire de la compilation Snapshot(s) paru un an plus tôt. Si les Stilettos sont ici en fin de carrière, avec d'ailleurs un titre plutôt moyen comparé au reste de leur excellente discographie, il s'agit probablement de la première apparition pour les trois autres groupes. Flamingos et Scurs œuvrent dans un garage anglophone de facture correcte mais pas suffisamment originale pour me séduire. Assez typique de l'époque (dans la mouvance Dogs, Flamin' Groovies...) ils sont peut être un peu desservi par la production assez sèche. Les Flamingos feront la même année un EP sur Surfin Bird (Ticket, Gamine...) tandis que les Scurs semblèrent plus populaires de l'autre coté des Pyrénées en éditant leur unique mini-album sur un label espagnol dont je pense reparler très bientôt pour un excellent groupe post-punk ibérique... 

La vraie surprise du disque provient donc du dernier groupe: les Exemples. Derrière cette formation peu connue nous retrouvons les premiers pas d'une figure importante de l'underground français 80s: Thierry Duvigneau plus connu sous le nom de Kid Pharaon. Les Exemples publia cet unique single ainsi qu'un album ( Paris Londres ou Berlin) l'année suivante... Avant que Thierry Duvigneau se mette à l'anglais et abandonne notre chère langue. Un regret à l'écoute de la sublime Juste Une Dernière Fois ! Le titre exprime l'essence même de ce qui me plaît dans le rock français: l'énergie, la hargne, la morgue le tout en sachant garder son élégance et un certain raffinement... On pense ainsi aux Dogs (et oui encore), à Gamine période Shandy Street ...mais avec un peu plus sec et nerveux ! Un morceau fantastique et une vraie merveille du rock français underground 80s. Reste à savoir ce que vaut l'album, quelques morceaux (ici et ) sur youtube (et une vidéo sur FR3 !) mais difficile de se faire une idée précise à leur écoute. Vous trouverez plus d'infos sur Rock Made In France et dans les disques rayés de François Gorin.


mercredi 26 octobre 2016

The Beau Brummels

Les Beau Brummels sont souvent considérés comme un groupe américain relativement mineur des années soixante. Bien sûr le groupe n'évolue pas dans les mêmes sphères que Jefferson Airplane ou The Velvet Underground mais pourtant ils ne furent pas loin de décrocher la timbale folk-rock autour de 1965, se faisant souffler la place de peu par d'autres Californiens: The Byrds.

L'histoire a cela d'injuste qu'elle retient d'avantage le nom des vainqueurs pour mieux plonger dans l'oubli le nom des perdants et des outsiders. Les Beau Brummels de San Francisco furent comme leurs collègues de Los Angeles parmi les premiers à comprendre sur le continent américain les Beatles et à les dépasser d'une certaine façon. Plus que des pastiches, les deux formations californienne s'approprièrent le langage pop que créaient les Liverpuldiens pour mieux y intégrer leur propre référentiel (folk). Si Laugh Laugh (lien), excellente chanson beatlesienne mais avec une authentique touche américaine, sortit avant Mr Tambourine Man, les Byrds surent enflammer les esprits et furent très logiquement le GRAND groupe folk-rock malgré ne pas avoir été tout à fait les premiers...

The Beau Brummels firent une carrière raisonnable avec plusieurs albums à la clef (dont les très estimés Triangle et Bradley's Barn par les connaisseurs). Leurs premiers disques sont ainsi gorgés de petites merveilles pop aux harmonies vocales soignées et aux structures d'accords toujours un peu plus délicates et ambitieuses que la concurrence (Just A Little par exemple)... Parmi mes morceaux préférés du groupe figure certainement Don't Talk To Strangers (produite par...Sly Stone) je dois reconnaître qu'il est aussi probablement l'un des plus jangly mais comment ne pas adorer cette voix suave et élégante, ces harmonies absolument parfaites procurant de tels frissons quand elles sont à l'unisson ?

lundi 24 octobre 2016

Police Control

Police Control est un des nombreux projets impliquant Mathis (ex-Jolis, mais aussi Skategang, Jeanne et Olivier etc.) cette fois ci en duo guitare/batterie. On connaît les appétences de l'intéressé pour la powerpop, ce projet confirme à quel point il est une des personnes qui comprend le mieux cette musique en France avec quelques autres Marseillais (feu les Departure Kids entre autre). 

Réduire Police Control à maîtriser les codes d'un genre qui en déborde parfois (à en devenir chiant) n'est cependant pas rendre justice à l'incroyable qualité de ces 4 titres publiés en catimini cet été sur bandcamp... Nous sommes mi-août, on voit un lien partagé par un pote sur un célèbre réseau sociaux que l'on finit par écouter nonchalamment et dès les premières secondes de sentimental on sait que l'on tient un truc.

J'ai adoré Police Control dès que je les ai vu sur scène, leur fraîcheur incomparable, la simplicité de la formule (dans l'esprit de Bikini Gorge), la qualité des chansons, le choix courageux (dans ce genre de musique) du français... La démo "à l'arrache" avait le mérite de fixer les idées mais ne donnait pas la mesure et l'ampleur nécessaire aux chansons du groupe. C'est désormais chose faite, Maxime (ex-Youth Avoiders, de Skategang, Rixe...et producteur du second EP de Rendez Vous) a su saisir l'essence du duo avec justesse: batterie minimale mais très efficace, jeu de guitare pop et musclé...

4 chansons et 4 tubes, chaque morceau brille par la qualité de son écriture, son énergie, sa vivacité...Tout simplement un des trucs les plus excitants et cool que j'ai entendu en 2016. Morceaux uptempo punk ou plus lourd et powerpop: le groupe gagne à chaque fois. Seul regret: l'EP est trop court, du coup je me le passe généralement trois fois de suite...

Police Control est un antidote fantastique à toute forme de défaitisme, reste plus qu'à voir ces morceaux (et d'autres ensuite!) publiés en vinyle, il semblerait que nos amis de Gone With The Weed y pensent et ce serait une excellente nouvelle, je serai parmi les premiers à l'acheter bien sûr !


jeudi 20 octobre 2016

Doc'Daïl

Dans mon panthéon personnel du hard rock et heavy psych français figure sans conteste possible: Doc Daïl et principalement pour un morceau, pur chef d’œuvre d'électricité incandescente Aere Perennius en face B de leur premier single, le plus recherché (il se négocie dans les 25€ pour une copie VG+) des trois non sans raison...Il fut compilé il y a une dizaine d'année sur le bootleg Têtes Lourdes, peut être l'unique compilation s'intéressant à la France sur cette période fascinante...

Le groupe, originaire de Toulouse , publie trois simples entre 1969 et 1971. Le line up change, le seul membre permanent étant...Ticky Holgado ! Parmi les musiciens ayant participé à l'aventure figurent notamment Claude Olmos (ex-5 Gentlemen, Cœur Magique, Alice, Alan Jack Civilization etc.), Joël Rive (ex-Les Boots) et bien sûr Simon Boissezon (Alice), compositeur de la chanson qui nous intéresse plus particulièrement aujourd'hui. Si vous souhaitez le détail des membres, je vous recommande bien sûr de regarder l'excellent site France Heavy Rock, très complet à ce sujet. Ticky, dont le surnom a été trouvé à l'époque du groupe, a ainsi connu une première vie, dans la musique avant son énorme succès au cinéma. Doc Daïl fut sa première expérience mais pas la dernières (des disques en solo ou des tentatives novelty gauloises bien 70s sous le nom de Léon etc.). Aucune ne lui permit une carrière de musicien professionnel stable. Il s'imposa  cependant d'avantage dans un rôle de l'ombre devenant notamment manager du groupe pop Martin Circus...

Le 45 tours s'ouvre sur Sad Harold (lien) un blues rugueux et déglingué dans un esprit assez proche de Captain Beefheart ou des anglais du Edgar Broughton Band (voir leur reprise d'Apache). Le morceau dénote les évidentes qualités du groupe: la voix expressive de Ticky, la guitare poisseuse et distordue... avant qu' Aere Perennius ne vienne effectivement vous chambouler pour l'éternité ! Le morceau majoritairement instrumental, si l'on exclue la courte déclamation en latin (ou quelque chose s'en approchant vaguement), vous prend à la gorge à travers une véritable orgie de guitares fuzz violentées par des wah wah, du feedback à gogo, une ligne de basse menaçante comme un classique post-punk et un jeu de batterie frénétique et animal... Le morceau est stratosphérique, sauvage, sale, méchant et absolument dément, de quoi vous en faire perdre votre latin ! Et éventuellement renoncé au catholicisme pour mieux embrasser Hendrix et la fée électricité...

La suite du groupe est forcément un peu décevante. Le dernier 45t (le seul en français) est moyen et oubliable: paru en 1971, dans une mouvance pop voir variété mais sans forcément de chansons mémorables. Le second simple publié l'année précédente est  lui recommandé, sans être aussi foufou que le premier Stone Me (lien) est un excellent titre de hard rock bluesy poussé par une rythmique musclé, on se rapproche ainsi peut être un peu plus des excellents Variations, une des références absolues de l'époque dans l'hexagone.