samedi 25 janvier 2014

Bilan 2013: ce qu'en retiennent les labels (2)

Le Turc Mécanique (facebook, bandcamp)
Je vais pas faire d'introduction, avec des conclusions qui se veulent universelles, voire sociétales, voire un peu connes. Simplement, je vais poser deux bases qui m'ont semblé essentielles par rapport à 2013.

D'abord, le fait que l'ancien monde semble continuer de patauger pour éviter de se noyer, que les organisations subventionnées, que les structures du droit d'auteurs et que nombre de nos prédécesseurs semblent définitivement perdus face à la réalité des différentes sphères de la musique. Qu'ils abdiquent enfin et que nous puissions reconstruire des choses plus pertinentes en lieu et place.

Ensuite, qu'artistiquement, nous n'avons plus à nous servir de longues vues pour lorgner sur les groupes américains, anglais, ou étrangers en général. Sans chauvinisme aucun, il suffit actuellement de se pencher sur nos scènes actuelles pour découvrir des artistes géniaux, souvent bien plus inventifs que des Jacuzzi Boys et consorts. Exemple parmi pleins d'autres.

A Paris, Yann Canevet a prouvé avec Venera 4, Future et Maria False que c'était sûrement l'un des musiciens les plus talentueux de sa génération, et son collectif, Nothing, avec Dead, Avgvst, Dead Horse One ou encore le petit dernier Marble Arch font la nique aux anglo-saxons sans se poser de question, en bossant avec rien.

En province aussi, le mot est large, il suffit de poser les yeux sur les différentes scènes dites « undergrounds » pour s’émerveiller. La haine des quatre diables de Strasbourg, la violence d'Harshlove, les velléités arty/lo-fi de mecs comme Zadrien Cocquart, Ventre de Biche etc... et tout ceci n'est qu'un tout petit extrait de ce tout ce qu'on aurait pu citer de fascinant.

Notre rôle, en tant que label, c'est maintenant de servir de curateurs, de marqueurs, de fonder à travers nos catalogues une espèce de compilation idéale. De rassembler ces artistes. Du côté du Turc Mecanique, cette année a posé les bases : on s'acharnera à soutenir tous les OVNIs sonores qui en vaudront la peine, comme on l'a montré avec Punks Are Fags, ces mecs qui mettent Martin Mystère en musique, ou Backt Mariah, qui invente une cold wave dansante à paillettes en se rêvant diva MTV. Il en va de même avec Last Night. C'est flippant de ce dire que ces trois gars proposent l'un des albums punk les plus puissant que j'ai entendu cette année, et qu'aucun label spécialisé n'a daigné le sortir. C'est peut être que le temps est plus au « Garage » optimiste, et qu'ils ont cette ambiance dark glauque, j'en sais trop rien. En tout cas, on le ressort dans une version un peu différente bientôt, en 12' et en coprod avec l'excellent label corbeau Manic Depression.

En tout cas, on a essayé plein de choses cette année, et l'an prochain s'annonce superbe. J'arrête ici de parler des groupes qu'on a défendu, vous avez le bandcamp, suffit de cliquer sur Play. Je préfère causer des labels qui travaillent à inventer le futur, ce que j'ose appeler une nouvelle génération.

D'abord, cette année, je pense qu'il fallait écouter vraiment en boucle les sorties d'Anywave. On adore travailler avec eux, ils ont un studio dont ils sortent des choses excellentes. Leurs 2 premières compilations sont d'une audace que j'ai vu nulle part ailleurs cette année, et le EP de People of Nothing, particulièrement la piste 1, A Break To Cry est incroyable. Et les artworks défoncent.

Dans le même esprit aventureux, tu as aussi Stellar Kinematics. Opale, Dorcelsius, leur compilation capsule, en tape. C'est visuellement très beau, la sélection est géniale, les choix sont méga risqués, et ça paie. Leurs mixtapes sont vraiment bien aussi, il manquerait plus qu'ils les sortent en cassette.

Y a eu aussi Fin de Siecle, qui m'ont rendu dingue avec Milan. C'était tellement inattendu que quand je l'ai vu à l'Espace B, j'ai fait un rejet. Et puis j'ai écouté le single : c'est du génie, les mecs réinventent le Dub, en mêlant tout ça à Suicide, les synthés etc... C'est sublime.

Yuk Fü ont aussi aligné les claques, avec Blackmail et le « Krystall » de Sydney Valette. La track est hyper intelligente, les remixes sont tops par Unison ou Gyrls, l'EP est superbe.

Après, RPUT pour Venera, évidemment. Et Croque Macadam et Howlin'Banana, vous êtes un peu nos « correspondants-guitare », quelque chose comme ça. L'album de Seventeen At This Time m'a aussi beaucoup touché, c'est clairement l'un des disques de l'année.

Sinon, j'ai de plus en plus l'impression que le format concert ennuie tout le monde, et qu'il faut rendre tout ça beaucoup plus marrant, festif, même quand c'est de la wave la plus plombée. En parlant de fête, je suis méga impressionné par le « clubbing queer », l’énergie qui se dégage d'une Kidnapp', d'une Sale, etc... Tout ceci n'est pas forcément musical, encore que, mais c'est impressionnant de voir l'engouement des participants. C'est très inspirant, je pense qu'on gagnerait parfois à décompresser, quitter l'immobilisme public-scène-artiste un peu chiant.

Sinon, du côté des médias, c'est cool aussi. Gonzai en version papier-décalé, Hartzine qui s'est définitivement imposé, Bong pour les guitares, Novorama, Ground Control to Major Tom, vous... La presse web française se porte de mieux en mieux, j'ai l'impression. Et la radio, avec Yummy pour les guitares et la Trayeuse Électrique pour les synthés, c'est inratable.

Et j'oublie plein de monde, hein ? J'ai l'impression qu'on a pas arrêté cette année.

2014 va vraiment être une grande fête, très bordélique, mais on risque de s'en rappeler, je pense.


Gone with the Weed (facebook, soundcloud)
Petite vue d'ensemble pour 2013, avec de plus en plus de monde aux concerts et des bons groupes de powerpop au nord comme au sud comme les Crusaders Of Love à Lille, Sun Sick et Departure Kids à Marseille, et nos petits chouchous de Skategang à Paris qui sont hors catégorie (n'est ce pas Alex...). 

Il y a eu un paquet de bon concerts à Paris cette année, on a particulièrement aimé Dead Gaze à la Méca, The Hussy et Dinosaur Jr. Mention spéciale pour le doublé gagnant Rat Columns et Rank/Xerox à Vincennes l'été dernier, et un super concert de Yussuf Jerusalem au Picolo à St Ouen. 

Au niveau des disques plutôt de super découvertes que des nouveaux bons albums de groupes qu'on connaissait déjà. Le maxi des australiens Lace Curtain sorti sur Mexican Summer, le premier album des Courtneys de Vancouver (Hockey Dad records) et l'album de Radioactivity avec des mecs de Marked Men, Bad Sports et Mind Spiders sur Dirtnap. L'excellent Lp de Youth Avoiders (Destructure / Build Me A Bomb) reste un des meilleurs albums de 2013 et fait du groupe un truc aussi bon sur disque qu'en concert. Sorti en décembre, le nouvel album solo de Jeffrey Novak (Cheap Time, Rat Traps) est vraiment hyper bien et mérite d'être écouté plus d'une fois, autant que la splendide pochette pompée à Bananamour de Kevin Ayers mérite d'être regardée. 

Si il y a pas mal de trucs à faire en ce moment à Paris c'est quand même pas un hasard, à noter le fait que l'équipe de l'Espace B a réussi à un faire un endroit au poil pour aller mater des concerts tant et si bien que Corentin Cariou semble s'être rapproché comme par magie du centre de Paris. 

Niveau labels Teenage Menopause tire bien son épingle du jeu avec un catalogue qui grossit et devient de plus en plus cool. Poliment a aussi sorti deux très bonnes cassettes (Dame Blanche et une chouette compile). On termine en vous faisant remarquer que Ether & Crac, l'émission de Maxime sur Radio Campus un lundi sur deux est probablement la meilleure solution pour écouter des trucs cools à la radio, ça l'a été pour 2013 et ça le sera sans aucun doute pour 2014. 

On regrette quand même la perte de deux groupes aussi différents que géniaux, la séparation des belges de Périphérique Est (mais leur super mini album sur Modern Action vient de sortir et ça rattrape un peu le coup) et le split de Sic Alps après plus de dix années à sortir des méga bons disques et à donner de super concerts.



2013 fut la deuxième véritable année pour WeWant2Wecord, notre label monté pour la beauté du geste, mais pas que...

On sait désormais un peu mieux ce qu’on veut qu’il soit, c’est-à-dire :
  • un label qui publie des disques qu’on aime, faits par des gens qu’on aime… Il n’y aura peut-être pas toujours une cohérence musicale dans nos choix de sorties mais il faudra absolument qu’il y ait ce côté humain.
  • un label qui ne soit pas un simple passe-temps, qui se satisfasse juste de ses sorties... On veut que ce soit potentiellement rentable (pas gagner d’argent mais équilibrer les budgets) et que cela serve aux artistes pour gagner en notoriété, tourner et enfin être signés sur un “vrai” label.
  • un label qui sorte des eps en cassette audio et tout le reste en vinyle.
Aussi, plus ça va, plus on est convainfesses d’être dans le vrai en organisant un festival annuel (le #1 Festival (bundy)) pour faire jouer, à Caen (14) et à la ville lumière (75), des groupes qu’on aime et notamment ceux dont on sort des disques -c’est d’ailleurs à ce moment là qu’on en vend le plus.
Aussi, ce festival est devenu un moyen pour nous de financer une partie des coups de pressage des vinyles -principalement grâce à la date Caennaise au Cargö. Ça fait un peu 2660° à la Live Nation mais bon, c’est comme ça…
On vient également de lancer une résidence bimestrielle au Motel, pour notamment 1) tisser des liens entre le un quatre et le sept cinq plus d’une fois par an et 2) boire des bières (83) plus ou moins à l’œil de façon plus régulière.
C’est cool.

S’il y a un truc chiant dans cette activité par contre, c’est bien la promo. Ça bouffe un temps incroyable, ça coûte de l’argent et c’est une sacrée source de frustration. Au début, ça nous énervait (euphémisme) de ne pas recevoir de retours, maintenant on arrive à prendre du refesse. On se dit qu’il doit manquer quelque chose dans notre manière de procéder, qu’il faut être patient, que c’est un métier, que ça portera ses fruits à long terme, ce genre de choses…
En tout cas, si vous avez des tuyaux, on est preneurs.

A l’origine, on n’était qu’un mp3 blog et le label, le festival… nous prennent tellement de temps que le blog est moins actif que dans les années 00’s.
On écrit moins mais on achète toujours autant de disques (de plus en plus d’américains, ce moins en moins d’anglais) et toujours aussi peu de trucs en digital (=rien).
On n’a d’ailleurs (comme tous les acheteurs de disques) quasiment acheté que du vinyle en 2013. Cependant, cela pourrait changer au vu des frais de ports faramineux dont il faut désormais s'acquitter pour en recevoir, des USA notamment.
Surtout qu’on reste attaché au CD. C’est pas si moche, un cd, et on a découvert certains de nos albums favoris dans ce format (on a plus de 30 ans)…
Au passage, vu comme les gens ont l’air de vouloir se débarrasser de leurs compact disques, il va y avoir de bonnes affaires à faire au niveau CD d’occaz en 2014 (on est prêts).

Pour en revenir au label, on va normalement sortir un LP, notre premier, en 2014.
Ce sera une réédition d’un disque qu’on a toujours aimé et qui est épuisé. Il n’y aura, a priori, pas le même travail de promo à fournir que si c’était le premier album d’un artiste qu’il faut faire découvrir, mais cela s’en approchera plus que de publier un 45 tours… Cette sortie pourrait s’avérer être une nouvelle expérience enrichissante (sauf au niveau pognon bien sûr) même si elle sera avant tout la concrétisation d’un projet qui nous tient à cœur (on est un peu des fillettes).
On va voir ce que ça changera au niveau de notre organisation et si on est capable de faire ça bien.
Si on estime que oui, on réfléchira à sortir des “premiers” albums…

En tout cas, 2014, tiens-toi prêt(e), on est chauds comme la Bretagne et ça va chier.

Les Roubinard Wigoler

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